Archives pour novembre, 2014
Une « mallette pédagogique » pour remplacer les ABCD de l’égalité
28/11/14
Expérimenté dans 600 classes de 10 académies volontaires, l’ABCD de l’égalité a été remplacé par une « mallette pédagogique » mise en ligne pour aider les enseignants à transmettre les valeurs d’égalité entre filles et garçons. Les ABCD devaient être généralisés à cette rentrée 2014 après évaluation. Pour éviter tout malentendu, l’Education Nationale a fait le choix d’un autre support afin que les parents puissent trouver des réponses à leurs questions. Ainsi, en vue de partager cette question de l’égalité et d’assurer une plus grande transparence, le Gouvernement rend accessible à tous le contenu de ces nouveaux outils par le biais d’un site internet.
La visée de ces outils est d’atteindre les objectifs qui ont été fixés par la loi du 8 juillet 2013 pour la refondation de l’école de la République. La loi a introduit un enseignement moral et civique permettant l’acquisition de l’égalité entre hommes et femmes. La loi prévoit également la sensibilisation des étudiants à cette question lors de leur formation aux métiers du professorat et de l’éducation. La mise en place de ces outils est l’occasion de rappeler que l’orientation et le parcours scolaire des filles et des garçons sont particulièrement déterminés par les considérations sexuées.
Parmi les pistes pédagogiques proposées aux enseignants du premier degré, il est conseillé de travailler sur l’expression corporelle et le mime afin que les enfants puissent exprimer des sentiments, des ressentis, des émotions indépendamment du sexe des personnages qu’ils jouent ou des êtres sexués qu’ils sont. En maternelle, il est suggéré des jeux dansés ou des rondes afin de dépasser les stéréotypes sexuels de la danse qui bien souvent pose problème aux petits garçons.
Le site rend public plus d’une centaine de pistes pédagogiques, du premier degré au second degré, qui permettront de remettre au cœur du projet éducatif cette question fondamentale de l’égalité.
Appel international du 13 novembre : c’est par la loi qu’avancera l’abolition de la prostitution
28/11/14
Le 1er congrès de la Coalition pour l’Abolition de la prostitution s’est réuni les 12 et 13 novembre 2014 à Paris, dans l’enceinte de l’Assemblée nationale à Paris. Survivantes de la prostitution, représentants de syndicats et parlementaires y ont travaillé sur le thème « Prostitution et traite des êtres humaines dans le monde : une exploitation des plus vulnérables ». A l’issue de ces travaux, les parlementaires lancent l’Appel du 13 novembre.
L’objectif global cristallisé par cet Appel est la création d’un mouvement international de législateur-e-s, actrices et acteurs de premier plan au contact permanent de la société civile. Ce mouvement se donne pour mission de sensibiliser et éclairer les opinions publiques et les gouvernements nationaux, régionaux et locaux afin de faire vivre l’idéal abolitionniste et humaniste adopté par l’ONU en 1949, et ainsi permettre aux millions de personnes dans le monde qui en sont victimes, majoritairement des femmes, de sortir du système prostitutionnel.
Dans un mois, le réseau de parlementaires dont la structuration débute par cet acte du 13 novembre 2014 adressera l’Appel, soutenu par une liste significative de premiers signataires, au Secrétaire Général des Nations-Unies. Simultanément, une demande de rendez-vous sera adressée à Vera Jourova, la nouvelle commissaire européenne chargée notamment des politiques « d’égalité » des genres, afin d’appeler son attention et son implication.
40 ans après la Loi Veil, une résolution pour réaffirmer le droit fondamental à l’IVG
26/11/14
Quarante ans, voici le jour anniversaire du discours de Simone Veil, alors Ministre de la Santé, défendant dans un hémicycle hostile son projet de loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Alors que ce droit tend à être remis en cause par les conservateurs européens comme en Espagne, les députés français se prononceront aujourd’hui sur une résolution visant à réaffirmer le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse en France et en Europe. Je vous propose de lire et partager ce communiqué de ma collègue Catherine Coutelle, Présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances, et auteure de cette résolution dont je suis signataire.
« Le 26 novembre 1974, Simone Veil montait à la tribune pour défendre devant les député-e-s le projet de loi qui allait dépénaliser l’IVG et en faire un droit pour les femmes. Le 26 novembre 2014, Catherine Coutelle présentera une proposition de résolution visant à réaffirmer le droit fondamental à l’IVG en France et en Europe, texte déposé sous son impulsion et celle du Président Bartolone.
L’adoption de cette proposition de résolution constituera un signal d’importance en France et en Europe. Signée par les présidents de chaque groupe politique siégeant dans l’Hémicycle (PS, UMP, UDI, Ecologistes, Radicaux et Communistes), ce geste politique n’en aura que plus de portée.
Dans l’Héxagone, réaffirmer le droit à l’IVG est une responsabilité qui est capitale pour soutenir, dans leurs vies quotidiennes et leurs combats, les femmes et jeunes femmes, les militants associatifs, les professionnels de santé. Pour que l’IVG, droit longtemps concédé, devienne un droit réel, fondamental.
A l’échelle européenne, alors que le droit à l’IVG reste soit contesté comme l’a prouvé le gouvernement conservateur espagnol récemment sans heureusement avoir gain de cause, soit mal assuré, soit toujours interdit par certains pays membres de l’Union, la France, dont la voix reste très attendue et entendue, se devait en cette occasion de prendre la parole pour en appeler à une harmonisation des législations permettant de mieux assurer ce droit fondamental pour les femmes, pour leur liberté, pour leur émancipation et pour l’égalité entre les femmes et les hommes.
La proposition de résolution sera débattue dans l’Hémicycle mercredi 26 novembre à la suite de la séance des Questions au Gouvernement, peu après 16h00. »
25 novembre : journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes
25/11/14
Le 25 novembre a lieu la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Cette journée constitue un temps important dans la lutte contre les violences puisqu’elle permet, par le biais de rencontres transdisciplinaires, de sensibiliser l’opinion au problème, d’améliorer les connaissances des citoyens, le partage d’expériences et la construction de réseaux professionnels. De plus, cette journée nous rappelle que la violence à l’égard des femmes constitue une violation des droits de la personne humaine et des libertés fondamentales et traduit des rapports de force inégaux entre hommes et femmes.
En France, pour l’année 2013, une femme décède tous les trois jours et 121 femmes sont décédées en une année, victimes de leur compagnon ou ex-compagnon. A ce titre, la loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, promulguée en aout 2014, vise à combattre par des moyens concrets les violences faites aux femmes dans la sphère privée. La loi prévoit notamment la généralisation du téléphone « grand danger ». En effet, la généralisation du téléphone portable d’alerte pour femmes en très grand danger est déjà déployée dans 10 départements. Son utilisation est très simple puisque par un appui unique sur une touche, la police est directement alertée par la victime et permet d’interpeller la personne violente avant un passage à l’acte. Au 30 juin 2014, 157 téléphones étaient déployés sur le territoire national. Une récente étude encourage le Gouvernement à poursuivre son action : le nombre de femmes décédées en 2013, victimes de leur compagnon ou ex compagnon a baissé soit 28 décès en moins par rapport à 2012.
On doit également saluer les premières réalisations du 4ème plan triennal de lutte contre les violences faites aux femmes dont on mesure déjà les effets positifs. Ainsi, grâce au renforcement du numéro unique dédié aux femmes victimes de violence (le 3919) on constate une augmentation du nombre d’appels traitables reçus qui est passé de 4 000 par mois en 2013 à 7 000 en 2014. Ces chiffres confortent le Gouvernement dans son action et nous montrent qu’il existe des moyens concrets et efficaces pour accompagner et protéger les victimes.
Pour l’abolition de la prostitution
25/11/14
Cette semaine j’ai défendu la position abolitionniste en matière de prostitution aux côtés du Mouvement du nid. Je ne l’aurais pas forcément fait en 2002, au moment où cette question était déjà en débat.
Je me rappelle une table ronde qui m’avait mise profondément mal à l’aise. Des femmes, surtout de gauche mais pas seulement, parlaient de ces « pauvres femmes » dominées, violentées, stigmatisées qu’étaient à leurs yeux les personnes prostituées. Elles prenaient leur défense, mais ne semblaient ni les voir, ni les entendre, alors même qu’elles étaient assises à la même table, comme si elles n’étaient pas là, où n’étaient pas des personnes à part entière. Les prostituées présentes revendiquaient un statut de travailleuses du sexe, voulaient des droits, mais leurs défenseures ne semblaient pas capables de leur adresser la parole.
Se prostituer n’est évidemment pas ce dont on rêve quand on est jeune, aucune d’elles ne l’affirmait d’ailleurs. Néanmoins, elles faisaient valoir que rares étaient les personnes qui exerçaient le métier auquel elles avaient rêvé étant enfants. Elles disaient aussi que vu leur niveau de formation et l’état du marché du travail, le nombre de possibilités alternatives qui leur étaient offertes étaient très limitées et que, si elles comprenaient que l’on puisse faire un autre choix, le leur, dans ces circonstances, était celui de la prostitution et qu’elles entendaient être respectées. Je crois que cette opinion peut être entendue.
On peut également penser qu’accorder un statut aurait été moins hypocrite et aurait permis également de leur octroyer des droits, notamment en termes de protection sociale. Néanmoins, je me demandais alors comment faire de la prévention auprès des jeunes si cette activité est considérée comme une activité professionnelle comme une autre. À cela s’ajoute le fait que les prostituées étrangères constituent environ 90 % des personnes prostituées en France aujourd’hui, alors qu’elles n’en représentaient qu’une petite part il y a trente ans. L’immense majorité des personnes prostituées sont prises dans des réseaux de traites d’êtres humains. Elles sont victimes de violences très graves, vivent dans une précarité extrême et sont dans un état de santé très dégradé.
Enfin, je crois essentiel d’inscrire dans la loi que le corps – en l’occurrence presque toujours celui des femmes – ne peut pas être acheté. La loi française est un pas vers le progrès, elle prévoit des moyens – insuffisants – pour aider les personnes souhaitant sortir de la prostitution, elle considère la personne prostituée comme une victime et non comme une délinquante, et rappelle aux clients leur responsabilité dans ce système d’exploitation des femmes, mais la route est encore très longue.
Flash info - Semaine du 17 novembre 2014
24/11/14
LOI ESS - A l’occasion du mois de l’économie sociale et solidaire (ESS), des films d’animation sont mis en ligne pour présenter de manière ludique les enjeux de la loi. Cette semaine : découvrez comment la #loiESS redonne du pouvoir d’agir aux salariés. Chaque année, 100 000 à 200 000 emplois sont supprimés suite à la disparition d’entreprises faute de repreneurs. La loi ESS apporte des réponses (décret du 28 octobre) notamment en reconnaissant le droit pour les salariés d’être informés préalablement à la vente de leur entreprise, pour éventuellement faire une offre. >> En savoir plus
MALTRAITANCE - A l’approche de la Journée internationale des droits de l’enfant, la Haute Autorité de santé publie une recommandation pour sensibiliser les professionnels de santé au repérage et au signalement de la maltraitance et met à leur disposition un outil interactif. La maltraitance des enfants est mal connue et certainement très largement sous-estimée dans la population française. Elle est également très largement sous déclarée par les médecins, avec à peine 5 % des signalements qui proviennent du secteur médical. >> En savoir plus
AGRICULTRICES - Créé en partenariat avec le ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, le guide « Femmes en agriculture. Vos droits ! » s’adresse aux femmes agricultrices ou souhaitant s’installer en agriculture, qu’elles soient cheffes d’exploitation, collaboratrices, salariées ou retraitées. Il leur présente de manière claire la marche à suivre pour bénéficier de l’ensemble de leurs droits sociaux, professionnels et personnels. >> En savoir plus
SIMPLIFICATION - Guidé par une volonté de simplification et d’amélioration des relations avec les citoyens, le Gouvernement a décidé qu’une absence de réponse de la part de l’administration pendant deux mois vaut désormais acceptation. Cette nouvelle règle, qui comprend des exceptions, est applicable aux demandes présentées à compter du 12 novembre 2014. >> En savoir plus
MIXITE DES METIERS - Marisol Touraine, Pascale Boistard et Najat Vallaud-Belkacem ont lancé la campagne nationale en faveur de la mixité des métiers, ce mercredi 19 novembre. Cette campagne déconstruit les stéréotypes dans le monde du travail et démontre qu’il n’existe pas de métier réservé aux femmes ou aux hommes. >> En savoir plus
FEMMES - Chaque année, plus de 200 000 femmes de 18 à 59 ans sont victimes de violences physiques ou sexuelles de la part de leur ancien ou actuel partenaire ; 83 000 femmes sont victimes de viol ou de tentative de viol et seules 13% d’entre elles déposent plainte. Le Gouvernement a fait de la prévention et de la lutte contre les violences faites aux femmes une priorité. La Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes du 25 novembre 2014 est l’occasion pour l’ensemble des acteurs de réaffirmer l’importance d’une mobilisation contre ces violences.Une carte recense l’ensemble des manifestations organisées à cette occasion sur les territoires. >> En savoir plus
DECROCHAGE SCOLAIRE - La lutte contre le décrochage scolaire est une priorité nationale pour laquelle des objectifs ambitieux ont été fixés. Le Premier ministre et la ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche présentent les mesures du plan de lutte contre le décrochage scolaire ce vendredi 21 novembre, autour de trois axes : la mobilisation de tous, le choix de la prévention, une nouvelle chance pour se qualifier. >> En savoir plus
Agenda - Semaine du 17 novembre 2014
24/11/14
Lundi 17 novembre
visite de l’association Croq’livres - séance de travail à ma permanence parlementaire - rencontre avec Marie-Guite Dufay concernant le lycée Montjoux à Besançon - rendez-vous avec l’association des paralysés de France (APF)
Mardi 18 novembre
commission d’enquête sur l’impact de la réduction du temps de travail : audition du directeur de la Sécurité sociale
Mercredi 19 novembre
séance de travail sur le rapport de la commission d’enquête sur l’impact de la réduction du temps de travail
Jeudi 20 novembre
commission d’enquête sur l’impact de la réduction du temps de travail : auditions d’Emmanuel Macron (ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique), de la direction du Budget et de l’INSEE
Vendredi 21 novembre
séance de travail à ma permanence parlementaire - « Bleu blanc coeur - agriculture santé » au lycée agricole de Dannemarie-sur-Crète - colloque du Mouvement du Nid : « La prostitution en France : problématiques juridiques et humaines, bilan et perspectives » - permanence parlementaire à la maison de quartier de Montrapon
Samedi 22 novembre
inauguration de la nouvelle mairie de Chaucenne - exposition artisanale à Avanne-Aveney
La Maison Verte : grandir ensemble
22/11/14
J’ai eu l’occasion récemment de me rendre à la Maison Verte à Besançon pour échanger avec l’équipe de professionnels qui accueille à l’Hôtel Jouffroy les enfants et leurs parents.
Lieu d’accueil, d’écoute et de parole, la Maison Verte de Besançon a été créée en 1995 sous l’impulsion des membres du Groupe Régional de la Convention Psychanalytique sur le modèle de celle créée à Paris par Françoise Dolto dès 1979.
Il s’agit, pour les familles, d’avoir la possibilité de rencontrer des professionnels à l’écoute de leurs préoccupations, sans rendez-vous, dans un lieu intermédiaire entre la vie familiale et la vie sociale à la fois pour aborder les questionnements qui peuvent surgirent à la naissance d’un enfant ou dans les années qui suivent et qui peuvent les laisser démunis, mais aussi pour proposer aux enfants un lieu de rencontre avec d’autres enfants avec la présence rassurante de leurs parents. Comme les professionnels de la Maison Verte ont tenu à me le préciser, ces questionnements peuvent être de l’ordre des simples problèmes quotidiens pas forcément graves mais qui pourraient devenir plus lourds s’ils perduraient sans réponse adaptée (problème du coucher par exemple) et pour lesquels une solution peut être apportée dès la première visite.
Deux jours à Berlin pour la commission d’enquête sur la réduction du temps de travail
19/11/14
Dans le cadre de la commission d’enquête sur les politiques de réduction du temps de travail, dont je suis rapporteure, je reviens de 2 jours de travail à Berlin avec trois collègues Gérard Sebaoun, député PS du Val d’Oise, Denys Robiliard, député PS du Cher et Jean-Pierre Gorge, député UMP, maire de Chartres. L’excellente organisation des administrateurs de l’Assemblée Nationale, en coopération avec l’Ambassade de France, nous a permis d’enrichir grandement nos travaux.
J’ai souhaité ce déplacement en Allemagne parce qu’il me semble toujours utile de se décentrer, de regarder les faits sous un autre point de vue que notre angle habituel. Nous cherchons à évaluer les politiques de réduction du temps de travail mises en place en France, en particulier les lois Aubry. Regarder comment d’autres pays ont procédé est une des façons possibles de se regarder avec un regard neuf, en se demandant « pourquoi ont-ils choisi de s’y prendre de cette façon ? « , « pourquoi ont-ils choisi ce moment ? « , » en quoi nos sociétés se ressemblent ou différent ? » et aussi » aurions-nous pu faire autrement ? ».
Au-delà de la proximité géographique bien commode, le choix de l’Allemagne ne doit rien au hasard. Il s’agit là d’un pays avec lequel nous partageons une histoire particulièrement forte, que l’anniversaire des 25 ans de la chute du mur de Berlin rend particulièrement vivante. Un pays auquel beaucoup se comparent, le prenant souvent pour modèle en raison de sa réussite économique notamment, une attitude très fréquente en France. Enfin, l’Allemagne est un pays précurseur en matière de réduction du temps de travail.
En effet, son processus de réduction collective du temps de travail a été initié bien avant les premières lois Aubry, en 1984, par des accords importants signés dans les secteurs de la métallurgie et de l’imprimerie. Un pays où, malgré les dires de la droite, les travailleurs ne travaillent pas « plus pour gagner plus ». Au contraire, le recours massif aux temps partiels amenait en 2009 selon l’OCDE une durée hebdomadaire moyenne du travail de l’ensemble des actifs de 37,7h en Allemagne, contre 38h en France.
Des rencontres et des chiffres encourageants pour l’emploi allemand. Nous avons rencontré le BDA, le patronat allemand, le DGB, principale confédération syndicale, le ministère du travail, le ministère de la famille. Nous nous sommes également rendus dans un hôpital pour évaluer la mise en application concrète de la réduction du temps de travail, ainsi que chez Siemens, industriel allemand de haute technologie, qui a notamment conclu depuis 2005 avec des syndicats de salariés plusieurs accords de diminution du temps de travail dans l’entreprise.
Le modèle allemand, un mythe ?
18/11/14
En ces temps de célébration des vingt-cinq ans de la réunification allemande, et de retour de Berlin, je souhaite revenir sur ce que l’on appelle « le modèle allemand ». Il y a vingt-cinq ans paraissait également l’ouvrage de Michel Albert Capitalisme contre capitalisme, dans lequel il comparait les modèles rhénan et anglo-saxon. L’auteur y défendait le modèle allemand d’un capitalisme régulé, qui, selon lui, se caractérisait principalement par un financement de l’économie laissant peu de place aux marchés financiers et par des syndicats forts dans l’entreprise et la société.
Aujourd’hui la référence au modèle allemand semble au contraire être utilisée pour justifier des salaires plus bas (directs ou différés par le biais des cotisations sociales), le démantèlement de l’État providence et l’augmentation du temps de travail, au mépris de l’observation de la réalité, comme le démontre, de façon très convaincante selon moi, Guillaume Duval, rédacteur en chef d’Alternatives économiques. Dans Made in Germany, le modèle allemand au-delà des mythes, il soutient que le succès de l’économie allemande tient à l’importance accordée à l’industrie et à un système de formation qui favorise l’apprentissage et valorise les métiers manuels, à la décentralisation réelle et ancienne qui permet des territoires plus équilibrés, au poids des corps intermédiaires, singulièrement des syndicats, et à des modes de management, semble-t-il, moins autoritaires. À cela s’ajoutent des explications plus conjoncturelles liées au recul de la population allemande qui explique largement l’absence de bulle immobilière et un coût du logement beaucoup plus faible qu’en France, mais qui posera des problèmes de financement des retraites ; au lien privilégié des Allemands avec les pays d’Europe centrale et orientale, qui constituent une main-d’œuvre peu chère. Quant à leur niveau de chômage plus faible, il s’explique d’abord par la démographie.
En effet, l’Allemagne a perdu environ 500 000 habitants depuis dix ans, quand la France en a gagné 5 millions. Mais aussi, contrairement aux idées reçues, les Allemands ne travaillent pas davantage que les Français, car ils ont davantage réduit leur temps de travail global que nous ne l’avons fait. Eurostat évalue le temps de travail effectif moyen des salariés en heures à 35,3 en France et 34,6 en Allemagne. Cependant, leur répartition du travail s’est, à certains égards, faite de façon plus inégalitaire encore qu’en France. En effet, 45 % des Allemandes, contre seulement 30 % des Françaises, travaillent à temps partiel, souvent très partiel et peu protégé. De plus, on trouve nombre de petits boulots – le kurzarbeit – rémunérés moins de 450 euros par mois. Ce compte rendu est évidemment bien pauvre par rapport à une réalité beaucoup plus complexe et riche, que j’invite chacun à approfondir.
Barbara Romagnan
Chronique publiée dans L’Humanité le 17 novembre 2014