Archives pour avril, 2014
Programme de stabilité et pacte de responsabilité : pourquoi je me suis abstenue
30/04/14
Mardi 29 avril, avec 40 députés socialistes, je me suis abstenue sur le vote relatif au programme de stabilité 2014-2017 et au pacte de responsabilité. Mes réserves ne portent pas sur l’objectif de réduction du déficit et la nécessaire maîtrise des dépenses publiques. Je partage cette exigence avec mes collègues. Il est d’ailleurs paradoxal d’affirmer vouloir réduire le déficit tout en prévoyant 41 milliards d’euros d’allègements de cotisations pour les entreprises. Mais c’est la trajectoire proposée par le Gouvernement me semble erronée et dangereuse, sur les plans social, économique et politique.
Le pacte proposé est largement déséquilibré. Il est injuste sur le plan social car la baisse massive des impôts auxquels sont soumises les entreprises est financée par un gel massif des prestations sociales. Ce sont donc les catégories populaires et moyennes qui paient pour les allègements de cotisations de toutes les entreprises, et ce, de façon indifférenciée, sans tenir compte de la taille, des filières, de l’exposition à la concurrence. Ces orientations risquent également d’être inefficaces sur le plan économique et de l’emploi. Les baisses de cotisations patronales, pratiquées depuis longtemps, n’ont jamais réellement montré leur impact massif sur le chômage. L’effet récessif à court terme de cette politique, souligné par le Haut conseil aux finances publiques, est un vrai risque. On peut par ailleurs s’interroger sur la rentabilité économique de ce dispositif : l’OFCE évalue à 130 000 euros, l’emploi créé dans le cadre du CICE (20 milliards d’euros de crédit d’impôt créeraient 150 000 postes).
Cette politique me paraît enfin dangereuse sur le plan politique. En entretenant l’idée qu’il n’existe qu’un seul diagnostic et qu’une seule politique efficace en matière économique, on prend le risque de détourner encore plus les citoyens des urnes ou de laisser aux démagogues et aux populistes le monopole de l’alternative. Or d’autres politiques associant justice sociale et efficacité économique sont possibles. On peut, comme nous nous y sommes engagés lors des campagnes de 2012, lutter contre la fraude fiscale, réduire les niches, engager enfin la grande réforme fiscale, investir dans la transition écologique. Avec de nombreux parlementaires, nous avons fait des propositions pragmatiques et, je crois, utiles au pays. En tant que députés, nous avons été élus dans la dynamique de l’élection présidentielle, soutenus et encouragés par de nombreux citoyens sur la base des engagements que nous avons pris devant eux. Le vote des municipales nous a rappelé douloureusement que nous nous en étions trop éloignés. Nous devons reconquérir la confiance de nos concitoyens et faire ce pour quoi nous avons été élus il y a moins de deux ans : réduire les inégalités sociales qui minent notre pacte républicain, nous engager vraiment dans la transition écologique, partager et réduire le travail pour chacun puisse travailler. Il nous faut préparer la France de demain et cela ne peut se faire sans investissements. Nous nous réjouissons, dans ce sens, d’avoir pu, par notre démarche, apporter quelques améliorations pour les minimas sociaux.
Nous voulons un redressement juste, par un équilibre entre la réduction des déficits et les investissements. Ce pacte n’est pas équilibré. Nous avons été constructifs en faisant des propositions. Nous continuerons à chaque étape à nourrir ce dialogue avec le Gouvernement. Notre volonté est d’être des acteurs de la réussite de la gauche au pouvoir.
Pinar Selek : un combat pour la liberté
30/04/14
Aujourd’hui se tient en Turquie le procès de Pinar Selek, sociologue et militante féministe turque. Ce procès constitue une énième tentative pour entraver les travaux de Mme Selek, et plus généralement décourager ceux qui s’intéressent à la question kurde aux questions d’inégalités femmes hommes.
Je vous propose de lire ci-dessous le communiqué que le Planning familial a publié pour l’occasion.
Solidarité avec Pinar Selek ! Pour que cesse l’acharnement politico-judiciaire
Après quinze années d’acharnement initié en 1998 par un séjour en prison et la torture, la prochaine étape -et ultime ?- se déroulera à Ankara pour un énième procès en appel. Un procès à l’initiative de ses avocats - contrairement aux précédents qui émanaient de la justice turque.
Pinar Selek a été condamnée en janvier 2013 à la prison à perpétuité par la 12e cour pénale d’Istanbul, alors qu’elle avait été acquittée par cette même cour à trois reprises en 2006, 2008 et 2011.
Ce sont ses travaux en tant que sociologue, ses luttes féministe et antimilitariste, ses engagements auprès des personnes sans domicile fixe, des enfants des rues, des Gitanes, des personnes trans, et surtout ses recherches sur la question kurde qui lui valent ce parcours insupportable.
Le cas de Pinar Selek devait intimider tous les chercheurs-·es et les militants-·es qui oseraient s’intéresser sérieusement aux sujets qui dérangent. La décision de Pinar Selek de ne pas abandonner et de poursuivre au contraire son travail pour la paix, son engagement dans le mouvement des femmes et ses recherches ont attisé l’acharnement à son égard.
Nous appelons à la Solidarité internationale avec Pinar Selek et avec toutes celles et tous ceux qui luttent aujourd’hui en Turquie et ailleurs pour la justice, l’égalité et la liberté !
France Bleu Besançon : forum des auditeurs du 28 avril
28/04/14
Ce lundi 28 avril 2014, de 8h10 à 8h30, j’étais l’invitée du Forum des auditeurs sur France Bleu Besançon. Il a été question essentiellement du programme de stabilité européen et du pacte de responsabilité et de solidarité proposé par le Gouvernement.
Je vous propose de réécouter cette interview ci-dessous.
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Le pacte de responsabilité affecte particulièrement les femmes - Tribune sur Mediapart
27/04/14
Au-delà du pacte de responsabilité dans sa globalité, dont j’ai déjà dit les réserves qu’il m’inspirait (notamment en m’abstenant lors du vote de la confiance au nouveau gouvernement) et sur lequel j’aurai l’occasion de revenir, je souhaiterais ici insister sur son impact spécifique sur les femmes.
Les mesures annoncées par Manuel Valls précisent comment sont calculés les 50 milliards d’économie décidés pour financer le pacte de responsabilité.
Elles comprennent notamment le gel des prestations sociales jusqu’en octobre 2015 et l’extension sur une durée indéterminée du gel du point d’indice, qui sert de base au calcul de la rémunération des fonctionnaires.
On peut comprendre qu’en situation de difficulté budgétaire, des efforts doivent être consentis par tous. Pour autant, ces efforts doivent être répartis selon la capacité contributive de chacune et de chacun. Et en l’occurrence, les femmes, souvent dans une situation économique moins favorable que les hommes, sont davantage touchées par ces économies. Pauvres ou très pauvres, retraitées ou mères isolées, les femmes sont exposées à plus d’un titre aux conséquences des mesures annoncées.
L’Observatoire des inégalités indique que le taux de pauvreté féminin était en France de 8,2 % en 2011, tous âges confondus, contre 7,7 % pour les hommes.
Certes, les minima sociaux seront cette année revalorisés en fonction de l’inflation, ce qui limitera l’effet de ces économies sur une partie des plus pauvres. Cependant, le gouvernement s’était engagé il y a tout juste un an, dans le cadre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté, à revaloriser de façon plus significative le RSA-socle, le complément familial et l’allocation de soutien familial. L’abandon de ces engagements sera lourd de conséquences sur celles et ceux de nos concitoyens qui reçoivent ces aides.
Or les femmes constituent 57 % des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA-socle) et la quasi-totalité des bénéficiaires du RSA-socle majoré (l’ex API, allocation parent isolé). En 2010, près de la moitié des familles monoparentales (dont 85% ont à leur tête une femme) recevaient l’allocation de soutien familial, soit 750 000 familles et 1,16 million d’enfants. Par ailleurs, 52% des familles monoparentales perçoivent un revenu inférieur à la moitié du Smic, soit un montant en-dessous du seuil de pauvreté. Là encore, il s’agit de reporter une revalorisation pourtant indispensable. Rappelons qu’il s’agit là des plus pauvres.
Le biocontrôle, une filière d’avenir pour produire autrement
24/04/14
Le 22 avril, à l’occasion de la journée mondiale de la Terre, le ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt a organisé un forum dédié au biocontrôle, à la Cité des sciences et de l’industrie. L’occasion pour le ministre, Stéphane Le Foll, de mettre en lumière cette filière d’avenir dont le développement est vivement encouragé dans le projet de loi d’avenir pour l’Agriculture, l’Alimentation et la Forêt, voté en première lecture par l’Assemblée nationale puis le Sénat.
Le biocontrôle est un ensemble de méthodes de protection des végétaux par l’utilisation de mécanismes naturels. Seules ou associées à d’autres moyens de protection des plantes, ces techniques sont fondées sur les mécanismes et interactions qui régissent les relations entre espèces dans le milieu naturel. Ainsi, le principe du biocontrôle repose sur la gestion des équilibres des populations d’agresseurs plutôt que sur leur éradication. L’une des techniques courantes les plus connues est, par exemple, l’utilisation de coccinelles pour lutter contre la présence envahissante de pucerons.
Les techniques de biocontrôle s’inscrivent dans le plan Écophyto et permettent de protéger les cultures en réduisant l’usage des produits phytosanitaires chimiques. Ces alternatives contribuent ainsi à la réduction des risques pour la santé humaine et pour l’environnement.
Concrètement, les produits de biocontrôle se classent en 4 familles :
- les macro-organismes auxiliaires sont des invertébrés, insectes, acariens ou nématodes utilisés de façon raisonnée pour protéger les cultures contre les attaques des bio-agresseurs.
- les micro-organismes sont des champignons, bactéries et virus utilisés pour protéger les cultures contre les ravageurs et les maladies ou stimuler la vitalité des plantes.
- les médiateurs chimiques comprennent les phéromones d’insectes et les kairomones. Ils permettent le suivi des vols et le contrôle des populations d’insectes ravageurs par le piégeage et la méthode de confusion sexuelle.
- les substances naturelles utilisées comme produits de biocontrôle sont composées de substances présentes dans le milieu naturel et peuvent être d’origine végétale, animale ou minérale.
Le projet de loi d’avenir sur lequel les parlementaires travaillent préconise clairement, dès son titre préliminaire, que « l’État veille aussi à faciliter le recours par les agriculteurs à des pratiques et des systèmes de cultures innovants dans une démarche agro-écologique. À ce titre, il soutient les acteurs professionnels dans le développement des solutions de biocontrôle et veille à ce que les processus d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché de ces produits soient accélérés. ». Le titre III du projet de loi vient préciser les contours du biocontrôle et met en avant des moyens pour le développer, au détriment des produits phyto-pharmaceutiques.
Rana Plaza : en finir avec l’esclavage moderne / Tribune dans Libération
23/04/14
Mon collégue député de Meurthe-et-Moselle, Dominique Potier, a publié hier une tribune dans Libération avec Edouard Martin, tête de liste PS aux élections européennes dans le Grand Est, un an après l’effondrement de l’usine textile du Rana Plaza qui a fait plus de 1 000 morts le 24 avril 2013.
Depuis plus d’un an, Dominique Potier, Danielle Auroi, Philippe Noguès et une plateforme d’ONG militent pour qu’une loi établisse un lien juridique entre les maisons mères, leurs filiales et leurs sous-traitants. Une proposition de loi est portée aujourd’hui par les 4 groupes parlementaires de gauche de l’Assemblée (SRC, Ecolo, RRDP et GDR) et soutenue par 4 syndicats (CFDT, CGT, FO et CFTC).
En cette semaine de commémoration de l’accident, il est nécessaire que le gouvernement prenne position en faveur de l’instauration en France d’un « devoir de vigilance » et défende ces valeurs au niveau européen et international de la même manière qu’il a su le faire pour les travailleurs détachés.
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Il y a un an, dans les ruines d’un immeuble de la ville de Dacca, au Bangladesh, le monde découvrait les corps de 1 138 victimes et, au milieu, les traces des marques textiles d’une des «fabriques» du monde. Un accident industriel sans précédent depuis Bhopal, qui aurait pu être balayé par le zapping médiatique si la révolte des familles des victimes et le travail patient et précis de plusieurs ONG n’avaient démontré le mécanisme à l’œuvre à Dacca et dans des dizaines d’autres drames restés dans l’ombre : une course folle au low-cost pour quelques centimes gagnés sur le prix d’un tee-shirt. La filière mondiale du textile «dopée» par la recherche de marges infinies fait payer le prix fort à ses petites mains : salaires indignes, conditions de travail honteuses et normes de sécurité méprisées.
Des mesures correctives furent annoncées par le gouvernement français et les quatre marques mises en cause ont fait, quant à elles, de belles déclarations d’intentions en promettant une réparation des dommages et un renforcement des dispositifs de prévention des risques. Force est de constater qu’un an après, les victimes ne sont toujours pas indemnisées. La raison en est simple : le jeu complexe de la sous-traitance qui engendre des chaînes de production sans visage permet aux entreprises transnationales d’afficher une innocence formelle et de s’affranchir de toute responsabilité sociale et environnementale.
En France, en réponse à cette injustice, une plateforme réunissant société civile et élus a conçu une loi établissant un lien juridique entre les «maisons mères», leurs filiales et sous-traitants. Rien de révolutionnaire, mais une simple transcription dans le droit français d’engagements pris par notre pays devant l’ONU et l’OCDE et qui vient rappeler l’universalité de la maxime de Sénèque : «Cui prodest scelus is fecit», «le coupable est celui à qui le crime profite».
Fait rare, cette proposition de loi, initiée par huit grandes ONG, est à ce jour déposée par quatre groupes parlementaires et soutenue par les quatre principales organisations syndicales françaises. Malgré cette coalition inédite, les organisations patronales font, jusqu’à présent, obstacle à l’inscription de cette loi dans le calendrier parlementaire au nom de la compétitivité.
Les entreprises peuvent-elles réduire le chômage ? : réécoutez la conférence
23/04/14
Vendredi 18 avril dernier, j’avais invité Alain Godard et Rémi Demersseman-Pradel, deux chefs d’entreprises, pour une conférence-débat au Théâtre de l’Espace à Besançon, autour de la question « Les entreprises peuvent-elles réduire le chômage ? ». Une centaine de personnes a répondu a mon invitation pour une soirée riche en témoignages et en échanges.
Afin de rendre le contenu accessible au plus grand nombre et comme je le fais à chaque fois, je vous propose d’écouter ou de réécouter cette conférence grâce aux enregistrements ci-dessous.
Intervention d’Alain Godard
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Transition par Barbara Romagnan
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Intervention de Rémi Demersseman-Pradel
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Echanges avec la salle
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Conclusion par Barbara Romagnan
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L’entreprise, moteur de l’activité économique et sociale, cristallise aujourd’hui beaucoup d’enjeux de notre société. Elle est au centre des conflits opposant actionnaires et salariés sur le partage des profits. L’entreprise peut-elle assurer tous les rôles attendus d’elle par la société, les dirigeants, les salariés ?
Dans le contexte de crise actuelle, de chômage de masse et d’affaiblissement de l’État et de ses moyens d’actions, les entreprises, quelle que soit leur taille, leur ancienneté, leur expertise, leur domaine d’activités, se voient en contrepartie de l’allègement de leurs cotisations, confier une responsabilité sociale majeure : la création d’emploi. Baisser le coût du travail, c’est le choix du pacte de responsabilité, proposé par le Président de la République pour relancer la croissance et lutter contre le chômage. Comment se pose le problème dans les entreprises ? Faut-il aujourd’hui laisser à ces seules entreprises la responsabilité de l’emploi et de la relance économique ?
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- Alain Godard, ex-PDG de Rhône-Poulenc Agro et président du directoire d’Aventis Cropscience, ex-dirigeant de PME dans l’agriculture et l’hôtellerie, conseil de plusieurs start-up de biotechnologie.
- Rémi Demersseman-Pradel, dirigeant d’entreprise, fondateur du groupe La part du rêve, spécialisé dans la gestion de crèche, défenseur de la performance globale (économique, sociale, sociétale et écologique) des entreprises.
Guillaume Duval : « France : le piège se referme »
18/04/14
Je souhaite partager cet article de Guillaume Duval, publié hier sur alternatives-economiques.fr.
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A cause des contraintes européennes, les marges de manœuvre de François Hollande et du gouvernement étaient limitées. Mais les mesures engagées ne vont pas dans le bon sens.
Le gouvernement français a donc finalement renoncé à demander à Bruxelles un délai supplémentaire pour ramener le déficit public sous la barre des 3 %. Ce qui l’amène à prévoir pour l’an prochain des mesures douloureuses socialement et politiquement difficiles à défendre comme la poursuite du gel du point d’indice des fonctionnaires, le blocage des retraites et des prestations sociales ou encore le report de la revalorisation du RSA prévue dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté. Entre la pression exercée sur la compétitivité française par la course au moins-disant social engagée chez nos voisins et le carcan budgétaire imposé par le TSCG dans la zone euro, la France se trouve prise dans un double piège : elle est obligée de rentrer dans une spirale déflationniste dont elle ne peut guère tirer de bénéfice.
Le piège de la course au moins-disant social
Depuis 2010, la France était un des pays de la zone euro qui avait le moins souffert de la crise parce que sa demande intérieure s’était maintenue. Fort heureusement, car cela a contribué de façon déterminante à éviter que la zone euro ne s’effondre. Il en était ainsi parce que le pays n’avait pas subi jusqu’ici de déflation salariale ni de baisse des dépenses publiques. Ce n’était pas le cas en revanche de la plupart de nos voisins en dehors de l’Allemagne, et notamment des pays les plus en crise : ils ont baissé rapidement leurs couts salariaux et donc restreint fortement leur demande intérieure. Résultat : alors que l’Espagne par exemple était avant la crise un des pays vis-à-vis duquel la France dégageait le plus d’excédents extérieurs avec un surplus de 6,3 milliards d’euros en 2007, l’Hexagone a enregistré un déficit de 1,9 milliard de mars 2013 à février 2014. Ce mouvement a donc nettement dégradé les comptes extérieurs du pays car, contrairement à l’industrie allemande, l’industrie française exporte peu hors de l’Europe. De plus, la course au moins-disant social engagée chez nos voisins a exercé une forte pression à la baisse sur les prix industriels, d’où une diminution des marges des entreprises françaises. C’est ce double constat qui avait conduit aux 20 milliards d’euros de baisse du coût du travail décidés en 2012 avec le CICE, devenus 30 milliards avec le pacte de responsabilité.
L’impossible équation budgétaire
Mais parallèlement François Hollande s’était aussi engagé dans sa campagne présidentielle à ramener les déficits français sous la barre des 3 % dès 2013. Pour ce faire il avait procédé l’an dernier à un tour de vis budgétaire sans précédent de 30 milliards d’euros (20 milliards d’euros de hausse d’impôts, 10 milliards de baisse des dépenses). Comme c’était prévisible, ce tour de vis a tellement cassé l’activité qu’il n’a finalement pas eu du tout les résultats escomptés en termes de réduction des déficits : ceux-ci ne sont revenus qu’à 4,3 % du PIB. Entretemps la Commission européenne avait cependant accepté de repousser à 2015 l’échéance à laquelle la France devait ramener ses déficits à 3%.
Les entreprises peuvent-elles réduire le chômage ? : conférence ce 18 avril à 20h
17/04/14
J’organise ce vendredi 18 avril 2014 à 20h au Théâtre de l’Espace à Besançon, une conférence débat sur le thème « Les entreprises peuvent-elles réduire le chômage ? », avec la participation de :
- Alain Godard, ex-PDG de Rhône-Poulenc Agro et président du directoire d’Aventis Cropscience, ex-dirigeant de PME dans l’agriculture et l’hôtellerie, conseil de plusieurs start-up de biotechnologie.
- Rémi Demersseman-Pradel, dirigeant d’entreprise, fondateur du groupe La part du rêve, spécialisé dans la gestion de crèche, défenseur de la performance globale (économique, sociale, sociétale et écologique) des entreprises.
L’entreprise, moteur de l’activité économique et sociale, cristallise aujourd’hui beaucoup d’enjeux de notre société. Elle est au centre des conflits opposant actionnaires et salariés sur le partage des profits. L’entreprise peut-elle assurer tous les rôles attendus d’elle par la société, les dirigeants, les salariés ?
Dans le contexte de crise actuelle, de chômage de masse et d’affaiblissement de l’État et de ses moyens d’actions, les entreprises, quelle que soit leur taille, leur ancienneté, leur expertise, leur domaine d’activités, se voient en contrepartie de l’allègement de leurs cotisations, confier une responsabilité sociale majeure : la création d’emploi. Baisser le coût du travail, c’est le choix du pacte de responsabilité, proposé par le Président de la République pour relancer la croissance et lutter contre le chômage. Comment se pose le problème dans les entreprises ? Faut-il aujourd’hui laisser à ces seules entreprises la responsabilité de l’emploi et de la relance économique ?
5ème rapport du GIEC : quand le monde (re)découvre que l’écologie est une question sociale
15/04/14
Ce week-end à Berlin paraissait le dernier rapport du GIEC, groupe intergouvernemental de scientifiques sur le climat. Ce rapport n’est que le dernier en date d’une longue série d’alertes qui relancent chaque fois nos débats politiques sur le dérèglement climatique et ses conséquences sociales et économiques à venir.
Hausse des températures mondiales et accroissement des inégalités : l’échec des politiques publiques existantes
Après le volet sur les preuves physiques du réchauffement publié en septembre 2013 et celui sur les impacts du réchauffement en mars 2014, ce dernier volet boucle le 5e rapport du GIEC. Sept ans après le précédent, il confirme l’échec des politiques publiques mises en œuvre jusqu’à présent. Les émissions mondiales de gaz à effet de serre atteignent des niveaux sans précédent, leur croissance n’a jamais été aussi rapide qu’au cours de la dernière décennie, et l’utilisation accrue du charbon, notamment dans les pays ayant misé sur les gaz de schistes, y a pour beaucoup contribué. A ce rythme, le seuil des 2 °C supplémentaires sera franchi dès 2030, pour 3,7 à 4,8°C d’ici la fin du siècle. Ce qui ne va pas sans conséquences pour chacun d’entre-nous, et notamment sur l’accroissement des inégalités.
La première des conséquences, et celle qui aura un impact quotidien sur nos modes de consommation et notre pouvoir d’achat, sera celle de l’accès aux ressources et la stabilité des prix. La diminution des récoltes agricoles et stocks de poissons due aux sécheresses ou à l’acidification des océans perturberont fortement la sécurité alimentaire de tous les pays. Le pouvoir d’achat des consommateurs européens ne sera pas épargné par la diminution des productions de riz, blé ou maïs au moment où la demande mondiale va augmenter. Là encore, les mêmes seront affectés, les plus pauvres, ce qui n’ont d’autre choix dans les produits et les manières de consommer que du hard discount et du pas cher.
Plus au Sud, ce sont les habitants des pays en voie de développement qui trinqueront. Le GIEC alerte sur la future progression des fléaux sanitaires, la sous-nutrition liée à la raréfaction des ressources, les conflits divers engendrés par les migrations climatiques et l’accès aux ressources. Pourtant, les gouvernements se renvoient la balle, l’Europe accusant les USA et la Chine de l’augmentation des émissions mondiales, les pays en développement pointant le rôle historiques des vielles économies industrielles comme les nôtres depuis plus d’un siècle.
L’expression du Secrétaire d’Etat américain n’a jamais été aussi appropriée « Ce rapport est très clair sur le fait que nous sommes face à une question de volonté mondiale et non de capacité ». Alors, qu’attendons-nous ?
Le sujet n’est plus scientifique, mais politique : mettons les bons sujets sur la table
Les scientifiques ne peuvent pas répondre à toutes les questions, et certainement pas celles des solutions politiques que nous devons mettre en œuvre en Europe et à l’échelle mondiale. Mettons donc les bonnes questions sur la table. Parlons croissance, croissance économique indexée sur l’accès aux ressources énergétiques, dans un contexte de raréfaction du pétrole et des énergies fossiles, d’augmentation de son coût et du trop faible développement des énergies renouvelables. Parlons de cette croissance économique aujourd’hui atone dans toute l’Europe et sur laquelle notre modèle de protection sociale, nos emplois, notre modèle économique et nos discours politiques restent pourtant focalisés. Les scientifiques du GIEC considèrent que la croissance économique et l’augmentation de la population restent les plus importants facteurs d’augmentation des émissions. On ne réduira pas la population mondiale, alors agissons sur le second facteur.