Après Varsovie, la déception et l’avenir du réchauffement climatique : la France au centre du jeu
Il y a quelques jours s’achevait la Conférence des Parties sur le Climat à Varsovie (COP19). Cette conférence internationale était sensée marquer une étape décisive dans l’écriture progressive d’un accord international sur le climat, dont la signature est prévue pour 2015 en France et qui aura vocation à remplacer le protocole de Kyoto d’ici 2020. C’est pourtant un sentiment d’échec qui se dégage de Varsovie, alors que les pays devaient se montrer ambitieux et s’engager à limiter leurs émissions de gaz à effet de serre, afin de limiter le réchauffement climatique à 2°C d’ici 2050.
Si les pays industrialisés se sont engagés à augmenter leurs versements aux fonds d’aides aux pays en développement et à faire preuve de transparence quant à leur provenance, c’est bien un texte a minima qui ressort de ce sommet, remplaçant tout principe de contrainte par des « contributions », sans objectif chiffré de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Je ne doute pourtant pas de l’implication de la délégation française, et je sais que les parlementaires font de même. Mes collègues de la Commission développement durable de l’Assemblée recevaient d’ailleurs mardi dernier Lord Jey qui exposait les avancées de l’action de Globe International pour faire adopter dans tous les pays des mesures environnementales. Je ne peux que souhaiter que l’on ait bien pris collectivement la mesure des enjeux environnementaux, sociaux et démocratiques du réchauffement climatique.
L’enjeu climatique, un défi environnemental, social et démocratique
Enjeu climatique en effet, car le dernier rapport du GIEC, Groupement Intergouvernemental de scientifiques sur le Climat, évoque une hypothèse d’augmentation des températures terrestres de 4°C par rapport à l’ère pré-industrielle. Ceci alors même que intensité carbone des différentes économies n’a pas faibli, bien au contraire, la Chine dépassait finalement en 2006, contre 2030 selon les premières prévisions de l’Agence Internationale de l’Energie, le niveau d’émissions des USA.
L’enjeu est également social, car l’on sait qui sont les premiers touchés par les événements climatiques meurtriers, à savoir les pays pauvres ou en voie de développement, ceux-là même qui aimeraient voir les anciens pays industrialisés comme l’Europe assumer leur responsabilité dans les niveaux d’émissions passés et actuels. Le récent typhon aux Philippines aura été suffisamment rappelé pendant la conférence. Social également, car ces même émissions ne sortent pas de nulle part, mais d’un modèle économique capitaliste particulièrement inégal que l’on peut encore qualifier de « productiviste », basé sur le libre-échange, théorisant la délocalisation des productions, et donc des pollutions et de l’exploitation humaine à l’autre bout du monde.
Enfin, l’enjeu est démocratique, car loin des termes de « catastrophe » ou de « désastre » qui voudraient laisser croire que le réchauffement climatique relèverait de la fatalité, les citoyens ont bien toute leur place à prendre dans les débats. L’organisation de contre-sommets sociaux parallèles aux conférences internationales sur le climat n’est pas anodine, elle est même souhaitable. C’est bien la place et surtout la reconnaissance officielle de la voie des associations, ONG et de la société civile dans l’ensemble de ces négociations sur le climat qui se pose. Des négociations dans lesquelles les multinationales adeptes d’une soi-disant « croissance verte » jouent quant à elle un rôle non négligeable.
Osons poser des mots sur les maux climatiques
La triple crise, sociale, écologique, économique, et même démocratique, est le reflet d’un modèle insoutenable, ne vivant que d’un productivisme obligé de susciter sans cesse de nouveaux besoins. Surconsommation, émissions de CO2, pollution des sols, déforestation, gestion inégalitaire de l’eau, marchandisation des semences nécessaires à la survie de paysans, les conséquences de ce modèle en crise sont tant sociales qu’environnementales.
Il est donc de la responsabilité de la France, comme de l’Europe dans son ensemble, d’assurer un effort partagé des pays dans la lutte contre le réchauffement climatique selon le principe fondamental de « pollueur-payeur », respectant les termes de « responsabilité commune mais différenciée » adoptés lors du Sommet Terre de Rio en 1992.
Les Fonds vert créé à Copenhague et Fonds d’adaptation de Kyoto, dont les promesses de donations étaient auparavant chiffrées en milliards, le sont désormais en millions, venant de la Finlande, l’Allemagne ou la Suède. Les coûts de ce désastre sont évacués par les pays riches, qui refusent d’en assumer la responsabilité, vers des pays pauvres qui ne peuvent en assumer les conséquences.
L’avenir est devant nous, à nous d’y mettre volonté politique
La France accueillera la prochaine conférence des parties (COP) en 2015 au Bourget. Soyons à la hauteur de ce que cet accueil implique. De nos engagements internationaux comme notre législation intérieure dépendra la crédibilité de l’accueil de cette conférence et de l’accord qui en sortira.
Je ne doute du fait que la France fera cependant mieux que la Pologne, qui a accueilli pendant la COP19 un Forum international sur le charbon et limogé son ministre de l’écologie, remplacé au pied levé par un ministre favorable au gaz de schistes.
Je ne peux que formuler le vœu que la diplomatie française soit aussi ambitieuse et précurseure sur les questions climatiques qu’elle l’a été sur le nucléaire iranien ou encore le Mali. Les enjeux ne sont pas moins importants.
Mais cette seule volonté politique et les incantations ne suffiront pas. La redéfinition de la notion de progrès, l’association d’un imaginaire collectif nouveau à des milliers de projets tendant vers la transition écologique seront deux enjeux déterminants pour l’avenir de la gauche et notre capacité collective à redonner espoir. A nous, socialistes, de dessiner un horizon et proposer d’avancer ensemble et entraîner le plus grand nombre sur le chemin d’un progrès nouveau.
Imprimer l'article | Cette entrée a été postée par Barbara Romagnan le 6 décembre 2013 à 17 h 48, et placée dans Développement durable et territorial. Vous pouvez suivre les réponses à cette entrée via RSS 2.0 Les commentaires et les pings sont fermés pour l'instant |
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about 1 year ago
lire ou relire l’excellente BD de Squarzoni : »saison brune » et réfléchir chacun de nos actes à l’aune du réchauffement climatique
(http://www.editions-delcourt.fr/special/saisonbrune/)