Le 15 mai dernier dans l’hémicycle, porté par Christiane Taubira et par la rapporteure au nom de la commission des lois, Marietta Karamanli, un débat s’est tenu sur l’adaptation du droit de l’Union et de certains engagements internationaux de la France relatifs au domaine de la justice.

Membre de la délégation aux droits des femmes, je me suis plus particulièrement engagée sur les dispositions portant adaptation de la législation française à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signées à Istanbul le 11 mai 2011.

Ainsi, pour mettre le code pénal en conformité avec cette convention, plusieurs modifications se sont imposées.

A ce titre et avant d’aller plus loin, je voudrais faire un petit aparté sur le rôle du Parlement dans l’adaptation du droit français aux engagements internationaux ou au droit dérivé européen (c’est-à-dire en quelque sorte aux textes de loi adoptés à l’échelle européenne et internationale et qui s’imposent selon des modalités diverses à l’Etat français ; que d’une façon ou d’une autre, les autorités publiques françaises sont tenues de respecter).

On a entendu souvent de la bouche de diverses personnalités politiques que 80 % des lois venaient de Bruxelles et certains y reconnaissent un déni de souveraineté populaire. Ce n’est à mon avis pas la bonne et juste approche. Il n’est pas contesté qu’un grand nombre de nos textes de loi sont impulsés par des dynamiques européennes et internationales, le pourcentage n’est pas fixe mais cela représente une part significative des textes que nous votons au Parlement. Pour autant, il y a deux choses à mettre en évidence. L’initiative au-delà d’un territoire national est aujourd’hui liée au monde moderne et au développement des échanges et il est cohérent à de multiples égards que nous ne puissions décider seuls. Les enjeux sont alors ceux de l’existence d’espaces démocratiques à cette échelle, mais je ne m’attarderai pas aujourd’hui sur cette question… En outre, un enjeu essentiel tient également au rôle du Parlement et de nos autorités publiques lors de ces adaptations. Comme le souligne Marietta Karamanli dans son rapport sur ce projet de loi : le législateur doit opérer de véritables choix politiques et ne doit pas être relégué au rôle de « moine copiste ». L’ensemble de ces textes internationaux laissent des marges de manœuvre qu’il faut savoir saisir.

Cela étant dit, et pour entrer dans le fond du texte qui était en examen le 15 mai, les modifications du code pénal en ce sens ont été axés notamment autour de l’incrimination du fait de tromper autrui dans le but de le forcer à conclure un mariage, de l’incrimination de la tentative d’interruption de grossesse sans le consentement de la personne intéressée et de l’incrimination de l’incitation non suivie d’effet à subir une mutilation sexuelle.

Toutes ces dispositions sont essentielles puisqu’elles mettent des mots et des interdictions formelles, sous peine de condamnations pénales, sur des faits qui jusque-là encore pouvaient être tolérés ou laissés dans l’ombre sous couvert de pratiques religieuses traditionnelles, voire parfois d’un certain sexisme ambiant.

Non, il n’est pas normal et il doit être condamné toute personne qui ment à une jeune femme participant à ce que celle-ci soit mariée de force dans son pays d’origine. Car le mariage de force a des conséquences extrêmement graves. Il est souvent suivi de viols répétés, d’enfermement, d’isolement et de destruction psychologique pour ces femmes.

Non, il n’est pas normal d’imposer à une femme d’avorter si elle ne le souhaite pas. Le droit de disposer de son corps est l’un des plus fondamentaux à l’homme comme à la femme et toute atteinte ne peut être tolérée.

Non, il n’est pas normal d’inciter un enfant, une enfant à subir une mutilation sexuelle. Et toute incitation doit être pénalisée. C’est le sens de l’amendement que nous avons proposé avec la délégation aux droits des femmes afin que cela concerne toute incitation quelle qu’elle soit, y compris si elle est sous forme de prêche lors d’une cérémonie religieuse.

Même si ce texte n’a pas fait la une des médias, il est pour autant particulièrement essentiel car il vient étendre le champ de protection des femmes et des enfants afin que ceux-ci vivent dans le respect de leur dignité et de leur liberté individuelle.

En savoir plus…

Consulter le dossier sur le site de l’Assemblée nationale