Libération - Samedi 8 et dimanche 9 juin 2013A lire dans Libération du samedi 8 et dimanche 9 juin 2013

Députée socialiste de la 1re circonscription du Doubs, Barbara Romagnan avait à peine 8 ans quand la gauche a accédé au pouvoir avec l’espoir de « changer la vie ». Issue d’une famille rocardienne, ce n’est pas forcément le bilan qu’elle fait des années passées par Pierre Mauroy à Matignon.

« Pour moi, il est avant tout l’homme de l’union de la gauche. Une union qui, alors, ne se limitait pas aux partis mais englobait les associations, les syndicats et également les mouvements d’éducation populaire, comme les cercles Léo-Lagrange qu’il a présidés de 1972 à 1981. Ensuite, Pierre Mauroy a conduit les travaux de la Fondation Jean-Jaurès. Nous avons encore besoin de cette porosité entre les différentes sphères de la société, de cette ébullition intellectuelle. L’union de la gauche a été conçue pour gagner les élections. Mais une fois qu’on l’a emporté, c’est le seul moyen de faire en sorte que l’expérience de l’exercice du pouvoir réussisse. Pierre Mauroy a contribué à faire venir des intellectuels au Parti socialiste et a œuvré pour que le PS pense différemment.

« Il restera aussi comme l’homme de la reprise du chemin vers la réduction du temps de travail, même si aujourd’hui cela n’est pas bien vu d’en parler. Quand on pense aux premiers temps du gouvernement de Pierre Mauroy, une foule de mesures viennent tout de suite à l’esprit. Il en va de même avec les premiers temps du gouvernement de Lionel Jospin, où l’on pourrait citer le passage aux 35 heures, la mise en place de la Couverture maladie universelle (CMU) et de bien d’autres choses encore.

« C’est bien sûr le Mauroy de 1981 qui reste dans les cœurs, davantage que celui du tournant de la rigueur. Je note qu’aujourd’hui, un seul versant de la réalité est évoqué : celui de la rigueur et d’une certaine forme d’austérité. Nous sommes la 5e puissance économique mondiale, mais la France compte 8 millions de personnes qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté. J’espère que François Hollande, après avoir commencé par la rigueur de 1983, va très vite en revenir à l’esprit de 1981.

« Je me souviens que lors de la convention d’investiture de Ségolène Royal pour l’élection présidentielle de 2007, j’étais assise juste à côté de Pierre Mauroy. Ce qui m’avait beaucoup impressionnée. Je n’oublie pas non plus son rôle dans les rangs de l’Internationale socialiste et notamment en direction des pays d’Amérique du Sud. »

Recueilli par Christophe Forcari