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Barbarin contre les barbares, par Séverin Naudet
21/09/12
Je vous propose la lecture de cette intéressante tribune de Séverin Naudet, ancien conseiller de François Fillon, parue dans Libération ce vendredi 21 septembre au sujet du mariage pour tous et des déclarations du cardinal Barbarin.
« Philippe Barbarin et André Vingt-Trois sont partis en croisade. Sabre au clair, ils ne laisseront pas faire ces barbares qui veulent changer le droit, l’adapter à la réalité de notre société. Ces barbares, ce sont les élus du peuple, mais cela a peu d’importance aux yeux de ceux qui, cet été, ont appelé la Vierge au chevet d’une France moralement malade.
Il ne s’agit en aucun cas de manquer de respect aux hommes et aux femmes qui réclament le mariage pour les couples du même sexe, rassure le cardinal Barbarin, mais la doctrine de la foi est très claire, le mariage est fait pour procréer, et protéger la famille ainsi fondée. C’est son objet : il est intangible et sacré.
Joseph Ratzinger ne voulait sans doute pas non plus manquer de respect à ces hommes et à ces femmes lorsqu’il expliquait en 1986 que «l’inclination particulière de la personne homosexuelle constitue une tendance, plus ou moins forte, vers un comportement intrinsèquement mauvais du point de vue moral».
Les évêques de France, de même, ne publiaient pas par seul souci pédagogique dans le Catéchisme pour adultes, en 1991, que «l’homosexualité est une déviation objectivement grave» et «qu’une société qui prétend reconnaître l’homosexualité comme une chose normale est elle-même malade de ses confusions».
Il n’est, dans cet esprit, pas très surprenant que l’archevêque de Lyon confonde aujourd’hui inceste, polygamie et homosexualité.
L’Eglise de France s’est lancée corps et âme dans un combat d’arrière-garde dont elle a le secret, elle qui a été si souvent le dernier rempart de l’ordre moral le plus rétrograde. Depuis le tribunal de l’Inquisition qui condamna Galilée à la prison pour idées contraires aux écritures saintes en 1633 jusqu’à Jean Paul II qui, lors d’une allocution sur les origines de la vie, le 22 octobre 1996 à l’Académie pontificale des sciences, considérait ex cathedra «les théories de l’évolution incompatibles avec la vérité de l’homme».
Les mots de Philippe Barbarin sont blessants pour beaucoup d’hommes et de femmes. Plus grave, ils sont dangereux parce qu’ils constituent potentiellement une incitation à la haine. Il est donc du devoir de nos responsables politiques, de droite comme de gauche, de les condamner clairement. A ce stade, le silence est presque assourdissant.
Il est aussi de leur devoir de condamner les attaques répétées de ce prince de l’Eglise contre la république. Le primat des Gaules n’a de cesse de remettre en question la légitimité du Parlement en lui opposant «l’inerrance biblique» : «La première page de la Bible» contre «les décisions circonstancielles ou passagères d’un Parlement». Sans doute fait-il référence à l’abolition des privilèges ou de la peine de mort… Peut-être n’est-il pas toujours bon que le Parlement décide de tout, particulièrement s’agissant de nos vies privées ; il semble en revanche plus sage que l’Eglise soit tenue à bonne distance de la République lorsque cette dernière s’apprête à légiférer sur ces mêmes sujets. »
Pourquoi je ne voterai pas pour le traité européen - Tribune dans Libération
16/09/12
Députée socialiste, nouvelle venue à l’Assemblée nationale, c’est après beaucoup d’hésitations que je ne voterai pas le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), la «règle d’or», qui va être soumis au vote des parlementaires. Une telle position - que je partage avec plusieurs député-e-s du groupe socialiste - mérite évidemment quelques explications que je dois aux socialistes, mais aussi aux électeurs qui m’ont fait confiance en juin. Il s’agit en effet d’un choix important et grave. Il n’y a rien de plaisant à se retrouver minoritaire dans le vote d’un texte présenté par sa majorité au risque de sembler vouloir s’en démarquer.
C’est un choix de conviction motivé par un engagement politique entier en faveur de la mise en œuvre du projet socialiste. D’ailleurs, heureusement notre agenda politique ne se limite pas aux débats sur ce traité - qui apparaît d’ailleurs largement caduc - et nous saurons nous concentrer sur la réalisation des grands chantiers nationaux et européens qui sont devant nous. C’est à cette aune que les Français nous jugeront.
Mon rejet de ce traité, c’est d’abord le refus d’un texte qui comporte de nouvelles atteintes aux espaces de délibérations et de choix des représentants élus.
Qu’il s’agisse de la règle d’équilibre budgétaire au moyen «de dispositions contraignantes et permanentes» ou du déclenchement«automatique» d’un mécanisme de correction, le traité réduit la politique économique à une règle de droit à laquelle les parlements nationaux devraient se soumettre. Au moment où nos sociétés connaissent une profonde crise de leurs systèmes démocratiques et où la défiance envers l’Europe se développe, on peut légitimement s’interroger sur l’opportunité de tels dispositifs.
Pour une « Gauche durable » - Tribune dans Libération
11/07/12
Le 8 juillet, j’ai publié une tribune dans Libération avec plusieurs collègues député(e)s et sénatrices. Je vous en propose la lecture.
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« La victoire complète de François Hollande donne enfin à la gauche le pouvoir d’agir. Ce n’est pas une victoire empoisonnée mais une force. La gauche peut réussir et durer. Mais à quelles conditions ? Trois nous tiennent à cœur : repenser notre modèle de croissance, remettre l’égalité des territoires au cœur de l’action publique et créer des cadres démocratiques et participatifs nouveaux.
Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault propose à la France de faire face à la crise tout en réparant les injustices et déséquilibres provoqués par la droite. Son énergie risque d’être, tout entière, absorbée par le redressement budgétaire et social et les défis européens. L’appel à la croissance pour relancer l’emploi ne suffira pas. La croissance productiviste et consumériste des Trente Glorieuses pourrait bien n’être que la nostalgie d’une génération.
Nous ne croyons plus à la formule qui lie relance du pouvoir d’achat et de la consommation, relèvement du taux de croissance et baisse du chômage. Nous assistons à une mutation structurelle de notre mode de production et de consommation, et pas seulement à une crise.
Des taux de croissance et des gains de productivité faibles, la stagnation du pouvoir d’achat combinée à la hausse des inégalités et à un chômage endémique persistent dans les pays industrialisés. Partout sur la planète, l’épuisement de nombreuses ressources naturelles, la tension énergétique, le mouvement spéculatif des capitaux et l’âpreté de la compétition internationale dominent. Autant d’indicateurs qui ne présagent pas d’un miracle au cœur de la vieille Europe.
Pour faire le pont entre l’ancien et le nouveau modèle de développement, nous voulons utiliser tous les leviers de l’action pour une prospérité sobre en ressources, moins consumériste, précautionneuse à l’égard des êtres humains et de la nature. C’est aussi un modèle de coopération pour l’Europe, le Maghreb et l’Afrique.
Les droits des femmes passent par la gauche
25/04/12
150 femmes et hommes féministes, engagé-es dans la société civile, appellent à voter pour François Hollande le 6 mai prochain, dans une tribune publiée sur le site de Libération. Je partage et m’associe à cet appel. Je vous invite à le signer sur le site internet dédié.
Nous sommes féministes. Le 6 mai prochain, nous voterons pour la gauche rassemblée, nous voterons pour François Hollande.
Nous voterons pour la gauche car elle est notre famille politique. Son histoire, son moteur, son identité, c’est de placer l’intérêt général avant les intérêts privés, la raison au-dessus des croyances ou des préjugés, c’est de faire reculer les oppressions et de construire une société où les dominations de toutes sortes n’auront plus leur place. La gauche est une alliée intrinsèque de la lutte des femmes pour leur libération parce qu’elle a pour but l’émancipation de chaque individu.
Ces cinq dernières années, le lien social a été affaibli, les inégalités se sont développées. Les femmes ont payé le prix fort des mesures libérales mises en œuvre par Nicolas Sarkozy : réforme des retraites, fermetures de centres IVG, recul de la parité, augmentation de la précarité du travail, féminisation de la pauvreté… Il est temps de changer de politique, pour les femmes comme pour la société toute entière.
L’amélioration réelle de la vie des femmes passe par des mesures spécifiques mais aussi par des politiques publiques qui visent le progrès social, par une plus juste répartition des richesses, le maintien et l’amélioration des services publics. A de nombreuses reprises, la gauche a soutenu les mobilisations féministes. Elle a prouvé qu’elle pouvait mettre en œuvre des politiques progressistes et favorables à l’égalité entre les sexes et à la liberté des femmes.
L’arrivée de la gauche au pouvoir est une condition importante de l’égalité entre les femmes et les hommes. Mais nous savons aussi que les mécanismes de domination, multimillénaires, d’invisibilité des femmes et de résistance à leur émancipation et à leur libération, sont puissants. Le candidat de gauche devra les combattre. Nous comptons sur lui. Nous serons là pour lui rappeler ses engagements, le soutenir quand il voudra lutter contre le patriarcat, et le bousculer si les vieux démons reprennent le dessus.
La promesse de François Hollande de rétablir le ministère des Droits des Femmes, dans un gouvernement paritaire, est un engagement majeur. Ce ministère, en travaillant avec les associations féministes, devra être un outil politique déterminant pour faire reculer les inégalités et inventer une autre société.
Nous affirmons la dimension profondément politique du féminisme. Nous attendons une remise en cause de cette organisation sexuée de la société qui crée et perpétue des inégalités intolérables entre les femmes et les hommes. Voter à gauche, c’est refuser l’assignation à des rôles pré-établis, c’est parier sur la raison et la capacité de chacune et chacun à s’extraire de sa condition pour devenir maître de sa vie. Voter à gauche, c’est parier pour un monde nouveau, dans lequel les droits des femmes passeront des textes de lois à la réalité.
Nous appelons toutes celles et ceux qui veulent que les droits des femmes retrouvent le chemin du progrès à se rassembler dans un vote de gauche, à voter François Hollande.