Article tagué Dominique Potier
Rana Plaza : en finir avec l’esclavage moderne / Tribune dans Libération
23/04/14
Mon collégue député de Meurthe-et-Moselle, Dominique Potier, a publié hier une tribune dans Libération avec Edouard Martin, tête de liste PS aux élections européennes dans le Grand Est, un an après l’effondrement de l’usine textile du Rana Plaza qui a fait plus de 1 000 morts le 24 avril 2013.
Depuis plus d’un an, Dominique Potier, Danielle Auroi, Philippe Noguès et une plateforme d’ONG militent pour qu’une loi établisse un lien juridique entre les maisons mères, leurs filiales et leurs sous-traitants. Une proposition de loi est portée aujourd’hui par les 4 groupes parlementaires de gauche de l’Assemblée (SRC, Ecolo, RRDP et GDR) et soutenue par 4 syndicats (CFDT, CGT, FO et CFTC).
En cette semaine de commémoration de l’accident, il est nécessaire que le gouvernement prenne position en faveur de l’instauration en France d’un « devoir de vigilance » et défende ces valeurs au niveau européen et international de la même manière qu’il a su le faire pour les travailleurs détachés.
- - -
Il y a un an, dans les ruines d’un immeuble de la ville de Dacca, au Bangladesh, le monde découvrait les corps de 1 138 victimes et, au milieu, les traces des marques textiles d’une des «fabriques» du monde. Un accident industriel sans précédent depuis Bhopal, qui aurait pu être balayé par le zapping médiatique si la révolte des familles des victimes et le travail patient et précis de plusieurs ONG n’avaient démontré le mécanisme à l’œuvre à Dacca et dans des dizaines d’autres drames restés dans l’ombre : une course folle au low-cost pour quelques centimes gagnés sur le prix d’un tee-shirt. La filière mondiale du textile «dopée» par la recherche de marges infinies fait payer le prix fort à ses petites mains : salaires indignes, conditions de travail honteuses et normes de sécurité méprisées.
Des mesures correctives furent annoncées par le gouvernement français et les quatre marques mises en cause ont fait, quant à elles, de belles déclarations d’intentions en promettant une réparation des dommages et un renforcement des dispositifs de prévention des risques. Force est de constater qu’un an après, les victimes ne sont toujours pas indemnisées. La raison en est simple : le jeu complexe de la sous-traitance qui engendre des chaînes de production sans visage permet aux entreprises transnationales d’afficher une innocence formelle et de s’affranchir de toute responsabilité sociale et environnementale.
En France, en réponse à cette injustice, une plateforme réunissant société civile et élus a conçu une loi établissant un lien juridique entre les «maisons mères», leurs filiales et sous-traitants. Rien de révolutionnaire, mais une simple transcription dans le droit français d’engagements pris par notre pays devant l’ONU et l’OCDE et qui vient rappeler l’universalité de la maxime de Sénèque : «Cui prodest scelus is fecit», «le coupable est celui à qui le crime profite».
Fait rare, cette proposition de loi, initiée par huit grandes ONG, est à ce jour déposée par quatre groupes parlementaires et soutenue par les quatre principales organisations syndicales françaises. Malgré cette coalition inédite, les organisations patronales font, jusqu’à présent, obstacle à l’inscription de cette loi dans le calendrier parlementaire au nom de la compétitivité.