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Pourquoi je voterai la Motion B et vous invite à faire de même
21/05/15
Aujourd’hui a lieu le vote sur les Motions dans le cadre du congrès du PS.
Comme élue et surtout comme militante socialiste, depuis plus de vingt ans, je n’ai jamais vécu une telle déception. Déception face à l’impuissance à améliorer la vie de nos concitoyens. Déception face à la défiance envers nous de la majorité de nos concitoyens et surtout les plus fragiles, ceux dont nous prétendons porter les intérêts et les aspirations, ceux qui ont besoin de la politique pour changer leur vie. Peut-on encore se dire de gauche, se réclamer du beau nom de « socialisme » quand la majorité de ce qui constitue le peuple, les gens modestes, les jeunes, les ouvriers, ceux qui ne vivent que des revenus de leur travail, ceux et celles qui survivent en alternant travail précaire et chômage, se détournent de nous ou ne nous écoutent plus ?
Nous avons l’obligation de comprendre cet échec.
Nous avons réalisé des avancées utiles et courageuses depuis notre arrivée aux responsabilités : loi agricole qui fait évoluer notre modèle dans le sens de l’agro-écologie, égalité entre les hommes et les femmes, mariage pour tous, loi consommation, loi santé, augmentation de moyens pour l’école, parité dans les communes de plus de 1000 habitants et dans les conseils départementaux, tiers-payant généralisé, reconnaissance de la responsabilité sociale des entreprises…
Néanmoins, nous consacrons l’essentiel des moyens au pacte de responsabilité. Cette politique ne fait pas partie de nos engagements, elle n’a pas produit de résultats significatifs et est extrêmement coûteuse. Alors que nous avions estimé les 60 propositions de François Hollande à 20 milliards pour la totalité du quinquennat, le seul pacte de responsabilité coûte 41 milliards… payés par les citoyens. Dans le même temps, nous ne réalisons pas les politiques pour lesquelles nous nous étions engagés, qui ne coûtent rien et qui pourtant représentaient une marque de considération attendue et légitime pour une partie de la population : le récépissé pour lutter contre le contrôle au faciès, le droit de vote des étrangers…
Certes la situation est difficile.
Les textes budgétaires européens sont contraignants, mais ils sont le produit de nos choix politiques ou de nos démissions. Ces règles établies par les politiques peuvent être changées par les politiques. On peut, on doit même par exemple aujourd’hui soutenir le gouvernement grec dans son action pour desserrer l’étau budgétaire, ne pas précipiter la récession et refaire de l’Europe un horizon désirable. Au lieu de cela, on fait passer les nouveaux représentants du peuple grec pour des irresponsables !
La croissance est faible, mais même à croissance zéro nous pouvons redistribuer les richesses plus équitablement. La France est un pays très riche, la 5ème puissance économique mondiale, des ouvriers parmi les plus productifs d’Europe, des chercheurs performants, des citoyens créatifs, des associations très dynamiques.
L’enjeu de ce congrès
Il s’agit de ne pas perdre de temps pendant les deux prochaines années qu’il nous reste au pouvoir et surtout de faire des choses utiles et significatives avant 2017 en direction de ceux qui nous ont élus. Essayons d’améliorer un peu la vie des gens, donnons-leur des signaux qui leur montrent qu’on ne les a pas complètement abandonnés. Faisons revivre l’espoir, ne nous résignons pas au retour inéluctable de la droite. Nos valeurs, nos arguments ne sont pas morts, nous ne devons pas en avoir honte et les assumer complètement, c’est la seule façon de répondre à la désespérance et à la régression xénophobe et populiste qui s’étendent dans notre pays et en Europe.
Pour cela, il nous faut clairement infléchir la politique du gouvernement et arrêter le double-langage insupportable pour les militants et qui nous discrédite auprès des citoyens. On ne peut pas affirmer des choses dans le texte d’une Motion et dans le même temps voter son contraire dans l’hémicycle, comme sur le travail du dimanche par exemple. Bien conscients que le temps est compté et que nous ne ferons pas en deux ans ce que nous n’avons pas su faire pendant les trois ans qui viennent de s’écouler, nous avons des revendications précises et acceptables par tous les socialistes :
- que la moitié du pacte de responsabilité soit affectée à des choses utiles : les entreprises qui investissent, qui embauchent ou améliorent les conditions de travail des salariés, aux capacités d’investissement des collectivités locales,
- qu’à défaut de faire la grande réforme fiscale à laquelle nous nous étions engagés, nous mettions enfin en place la progressivité de la CSG,
- que l’on apporte un vrai soutien aux territoires oubliés qu’ils soient urbains, rurbains ou ruraux,
- qu’on fasse une deuxième loi bancaire qui assure la séparation des activités de dépôt et les activités de spéculation,
- que l’on donne des signes concrets d’engagement vers un nouveau modèle de développement qui prenne en compte les enjeux environnementaux et la préservation de la nature,
- que l’on commence à négocier vraiment la réorientation de la politique européenne.
En 2012, nous avons été élus pour mettre en œuvre les politiques que nous avons proposées aux Français au travers des 60 engagements de François Hollande. Si les politiques menées s’en écartent trop, nous pensons avoir le devoir moral et politique comme militants, comme élus (quand nous le sommes), de prendre la parole, d’exprimer nos désaccords et de faire d’autres propositions. Nous sommes certes co-acteurs du pouvoir mais nous sommes, comme socialistes, d’abord des dépositaires de la volonté populaire et des garants de nos valeurs.