Ce week-end à Berlin paraissait le dernier rapport du GIEC, groupe intergouvernemental de scientifiques sur le climat. Ce rapport n’est que le dernier en date d’une longue série d’alertes qui relancent chaque fois nos débats politiques sur le dérèglement climatique et ses conséquences sociales et économiques à venir.
Hausse des températures mondiales et accroissement des inégalités : l’échec des politiques publiques existantes
Après le volet sur les preuves physiques du réchauffement publié en septembre 2013 et celui sur les impacts du réchauffement en mars 2014, ce dernier volet boucle le 5e rapport du GIEC. Sept ans après le précédent, il confirme l’échec des politiques publiques mises en œuvre jusqu’à présent. Les émissions mondiales de gaz à effet de serre atteignent des niveaux sans précédent, leur croissance n’a jamais été aussi rapide qu’au cours de la dernière décennie, et l’utilisation accrue du charbon, notamment dans les pays ayant misé sur les gaz de schistes, y a pour beaucoup contribué. A ce rythme, le seuil des 2 °C supplémentaires sera franchi dès 2030, pour 3,7 à 4,8°C d’ici la fin du siècle. Ce qui ne va pas sans conséquences pour chacun d’entre-nous, et notamment sur l’accroissement des inégalités.
La première des conséquences, et celle qui aura un impact quotidien sur nos modes de consommation et notre pouvoir d’achat, sera celle de l’accès aux ressources et la stabilité des prix. La diminution des récoltes agricoles et stocks de poissons due aux sécheresses ou à l’acidification des océans perturberont fortement la sécurité alimentaire de tous les pays. Le pouvoir d’achat des consommateurs européens ne sera pas épargné par la diminution des productions de riz, blé ou maïs au moment où la demande mondiale va augmenter. Là encore, les mêmes seront affectés, les plus pauvres, ce qui n’ont d’autre choix dans les produits et les manières de consommer que du hard discount et du pas cher.
Plus au Sud, ce sont les habitants des pays en voie de développement qui trinqueront. Le GIEC alerte sur la future progression des fléaux sanitaires, la sous-nutrition liée à la raréfaction des ressources, les conflits divers engendrés par les migrations climatiques et l’accès aux ressources. Pourtant, les gouvernements se renvoient la balle, l’Europe accusant les USA et la Chine de l’augmentation des émissions mondiales, les pays en développement pointant le rôle historiques des vielles économies industrielles comme les nôtres depuis plus d’un siècle.
L’expression du Secrétaire d’Etat américain n’a jamais été aussi appropriée « Ce rapport est très clair sur le fait que nous sommes face à une question de volonté mondiale et non de capacité ». Alors, qu’attendons-nous ?
Le sujet n’est plus scientifique, mais politique : mettons les bons sujets sur la table
Les scientifiques ne peuvent pas répondre à toutes les questions, et certainement pas celles des solutions politiques que nous devons mettre en œuvre en Europe et à l’échelle mondiale. Mettons donc les bonnes questions sur la table. Parlons croissance, croissance économique indexée sur l’accès aux ressources énergétiques, dans un contexte de raréfaction du pétrole et des énergies fossiles, d’augmentation de son coût et du trop faible développement des énergies renouvelables. Parlons de cette croissance économique aujourd’hui atone dans toute l’Europe et sur laquelle notre modèle de protection sociale, nos emplois, notre modèle économique et nos discours politiques restent pourtant focalisés. Les scientifiques du GIEC considèrent que la croissance économique et l’augmentation de la population restent les plus importants facteurs d’augmentation des émissions. On ne réduira pas la population mondiale, alors agissons sur le second facteur.