L’association « Les invités au festin » reçue au ministère de la Santé
« Les invités au festin », association bien connue des Bisontins, a été reçue au ministère des Affaires sociales et de la Santé. L’enjeu était notamment de défendre la vision d’une psychiatrie citoyenne, que porte l’association.
Depuis plusieurs années, en particulier depuis 1999 à la suite des Etats généraux de la santé initiés par Bernard Kouchner, un mouvement s’est créé sous cette appellation. Son application a trouvé sa première réalisation en Franche-Comté, grâce au travail de Marie-Noëlle Besançon et Bernard Jolivet.
L’idée est que la psychiatrie, spécialité médicale, n’en est pas moins politique par ses conséquences sur la vie des individus et sur la société en général. Elle participe de l’évolution de la société. De ce fait, elle est l’affaire des citoyens et ne doit pas être réservée aux professionnels ou à ceux qui ont connu la maladie. Elle veut donc faire appel aux citoyens ordinaires pour réfléchir et donner leur avis sur son organisation, à côté de l’Etat qui garderait un rôle de régulateur et fixerait les grandes lignes de la nécessaire réforme. En cela, la démarche des Invités au festin se pose comme un complément, un relai en direction de la société, afin de permettre une réintégration maximale des patients tout en prenant en compte la spécificité de leurs parcours. Les nombreuses activités proposées par l’association permettent de faire le lien avec la société dans la perspective de donner aux patients la plus grande autonomie possible.
Le problème est notamment que les systèmes sanitaires et médico-sociaux ne correspondent plus aux besoins en matière d’accueil des personnes en souffrance psychique, en plus d’être confus et coûteux, selon les partisans de la psychiatrie citoyenne. Les formations dispensées aux personnels tels que les infirmiers psychiatriques ou les éducateurs spécialisés ne sont généralement pas adaptées dans ces cas précis et pourraient parfois conduire à des situations de maltraitance involontaire souvent ignorées. Par ailleurs, la fermeture depuis une vingtaine d’années de la moitié des lits en hôpital psychiatrique n’a pas été compensée par la mise en place de structures alternatives, reléguant de fait beaucoup des patients à la rue à l’issue de leur prise en charge. La psychiatrie citoyenne constitue un relais souple et adapté à ces situations dans lesquelles l’accompagnement constitue un moment décisif du retour à la société.
Lors de ce rendez-vous, il a été rappelé que la France demeure l’un des pays les plus stigmatisant pour les populations présentant des troubles psychiques. Dans ce domaine, les lois votées au cours de ces dernières années ont largement encouragé une dérive sécuritaire très éloignée de l’idée du soin, en abordant essentiellement la question de la psychiatrie sous l’angle de la répression et de l’enfermement. Une attitude respectueuse des patients et des citoyens consiste au contraire à impliquer la collectivité dans toutes les activités possibles en marge des soins médicaux à proprement parler.
Dans un contexte budgétaire restreint, un concept tel que celui porté par les IAF constitue une réponse pragmatique et humaine aux questions posées par les modes de prises en charge de la psychiatrie. Les enjeux liés à sa reconnaissance ont trait tant à des perspectives de soutien financier qu’à la nécessité de renouveler les formes traditionnelles d’approche de la psychiatrie par et pour les citoyens.
Les expérimentations très concluantes menées jusqu’à maintenant par l’association revêtent un intérêt particulier dans le cadre de la mission parlementaire sur la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie qui ne manque pas de souligner la nécessité d’une refondation de la réflexion sur ces sujets.
En savoir plus…
Le site internet des Invités au festin
Les travaux de la mission d’information sur la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie
Imprimer l'article | Cette entrée a été postée par Barbara Romagnan le 29 mai 2013 à 22 h 17, et placée dans Affaires sociales, Franche-Comté. Vous pouvez suivre les réponses à cette entrée via RSS 2.0 Les commentaires et les pings sont fermés pour l'instant |
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about 2 years ago
Chère Barbara, je ne comprends pas que tu puisse laisser écrire « que la formation des infirmiers psychiatriques et des éducateurs ne sont pas adaptées et conduisent de fait à des situations de maltraitance.. »
Cette stigmatisation des salariés, qui travaillent souvent dans des conditions difficiles n’est pas à la hauteur des réponses qu’un élu de gauche doit apporter.
Les réponses du type « Invités aux Festins » sont certes très intéressantes mais ne touchent qu’une partie des pathologies et des patients rencontrés, il s’agit de patients « stabilisés » dans leurs symptômes, le problème crucial se trouve aujourd’hui en amont comment prendre en charge des patients en crise ou en errance avec des pathologies « lourdes » (ce que ne peut pas faire des structures de ce type), c’est ce quotidien là auquel sont confrontés les éducateurs et infirmiers, et des structures du type IAF ne peut constituer loin de là la seule réponse. Il y a là un lobbying qui rejoint les préoccupations économiques, réduire l’offre de soins, réduire le nombre de lits, c’est ce qui s’est passé dans les années 70-80, où sous couvert d’anti psychiatrie on a réduit le nombre de place.
Même si aujourd’hui, effectivement, les soignants sont soumis à des lois sécuritaires (que par ailleurs la Gauche ne change pas !), il faut arrêter de stigmatiser l’hôpital psychiatrique, la solution n’est pas dans des réponses parcellaires, mais dans le développement d’un service public de psychiatrie, basé sur la politique de secteur, dans lequel bien sûr les structures alternatives ont leur place, toute leur place mais rien que leur place , mais dans laquelle l’hôpital comme lieu d’accueil « d’asile » au sens noble du terme a aussi sa place.
C’est à la lumière d’une expérience de plus de 20 dans des structures extra hospitalière que j’écris ces lignes.
about 1 year ago
Bonjour, je tiens tout d’abord à vous remercier pour votre soutien aux Invités au Festin et à travers eux, à la psychiatrie citoyenne.
Je viens seulement de découvrir ce texte, et, comme Gilles Spicher que je connais bien, j’ai sursauté au terme de « maltraitance » que personnellement je n’ai jamais employé pour parler de la situation dans les hôpitaux psychiatriques (HP). Mais je pense qu’il s’agit d’une maladresse, d’un raccourci voulant exprimer le fait que le système psychiatrique, tel qu’il est organisé aujourd’hui ne peut pas bien soigner, ou « bien traiter » , donc soigne soigne mal, ou « traite mal » les patients.
Dans un tel contexte, je pense que les soignants font ce qu’ils peuvent, du mieux qu’ils peuvent, avec des moyens de plus en plus réduits (en personnel et financiers) et des normes et protocoles à respecter de plus en plus drastiques.
Ils ne s’agit pas de stigmatiser l’HP, mais de proposer d’autres formes de lieux de soins et de vie qui manquent cruellement aujourd’hui, l’HP devant rester un lieu exclusif de soin, et s’intégrer dans la Cité, comme le demande la politique du secteur qui malheureusement n’est pas allée au bout de son application, puisqu’on a laissé l’hôpital au centre du dispositif: Aucun lieu de soin n’existe en dehors de lui, il reste donc toujours excluant et stigmatisant en tant que connoté psychiatrique, dans une société elle même extrêmement stigmatisante.
Tout le monde a à travailler ensemble dans le système actuel bien qu’il ne soit pas satisfaisant, que l’on soit dans ou hors hôpital, sans esprit de compétition, afin que les patients puissent vivre leur parcours de vie et de soins de façon la plus satisfaisante possible. Je crois que c’est ce qui se passe dans notre département entre les structures hospitalières et nos lieux de vie. Il y a une bonne intelligence relationnelle, et une confiance et reconnaissance mutuelle du travail de chacun.
Les lieux de soins sont totalement indispensables, mais ils doivent pour nous, idéalement, se situer dans la cité, grâce à terme, à une reconversion progressive de l’HP sans supprimer un seul lit, ceux ci étant reconvertis en places de logement accompagné, ce qui n’est pas du tout le cas actuellement (suppression sèche de lits, sans aucune création à l’extérieur): c’est de là que vient le problème.
Le but premier n’est certainement pas de faire des économies, mais de rendre le système psychiatrique plus humain, plus citoyen, plus juste, plus efficace, et pas plus onéreux, alors qu’il est le contraire actuellement.
Ce qui n’est satisfaisant sur aucun plan: scientifique, éthique, sociétal, humaniste, ni pour les soignants, ni pour les personnes concernées par des problèmes de santé mentale.
les politiques ont effectivement un rôle essentiel à jouer dans ce domaine de la santé mentale, pour la défense de ces valeurs humanistes et sociales qui sont normalement prioritairement les leurs.
Merci d’avance pour la poursuite de votre soutien dans ce sens, pour faire advenir une psychiatrie qui soit enfin vraiment humaniste pour tous.