IVG : quand le Front national parle « d’inattention »…
Marion Maréchal Le Pen a récemment déclaré concernant l’avortement que ce n’était « pas à l’Etat de réparer les inattentions des femmes », dénonçant là l’intention du gouvernement de rembourser intégralement l’IVG.
En parlant d’« inattention », Mme Maréchal Le Pen sous-entend que l’avortement est un confort et une facilité. C’est la manifestation d’une conception de la féminité des plus rétrogrades, de celles qui désignent la femme comme une criminelle inconséquente qui n’a pas su maitriser sa sexualité.
Marion Maréchal Le Pen poursuit : « Il faut dérembourser [les interruptions volontaires de grossesse]. On a quand même des moyens de contraception abordables. Je pense que c’est un acte grave et qu’aujourd’hui on est confronté à un certain nombre d’excès ».
Face à de tels propos, je souhaite rappeler que l’existence d’une contraception abordable répond à un problème différent de celui que règle l’IVG. La contraception est un moyen pour prévenir la grossesse, elle ne résout rien pour les femmes tombées enceintes alors qu’elles ne le souhaitaient pas ; cela relève presque de la gageure de devoir l’expliquer.
Par conséquent, ne doutons pas qu’en déremboursant l’IVG, les avortements ne diminueraient pas pour autant, mais on jetterait par contre des femmes dans la précarité et la détresse. Cette logique culpabilisante et punitive s’oppose radicalement aux valeurs humanistes défendues par les républicains en général et la gauche en particulier.
Faut-il rappeler que l’IVG répond à une situation sanitaire de fait, et qu’il n’encourage ni ne promeut en aucune façon l’avortement lui-même, les chiffres l’attestent. Faut-il rappeler que les avortements sont pratiqués quoiqu’il arrive, et que l’IVG permet que ces avortements cessent de constituer un danger pour la santé des femmes obligées de le pratiquer dans la clandestinité ?
Plus généralement, parler à l’instar de Marine Le Pen d’IVG « de confort » est un scandale quand on sait la douleur et la pénibilité d’une telle intervention ; quand on sait dans quelles situations de détresse se trouvaient les femmes avant l’adoption de l’IVG ; quand on sait aujourd’hui encore les conditions sociales et financières des femmes qui y ont recours ; quand on sait enfin la pression morale à laquelle sont déjà soumises ces femmes. Aussi, je m’insurge contre des propos qui tendent à faire de la femme un être inconséquent, tellement irresponsable d’elle-même et des autres qu’il faudrait l’empêcher d’avoir pleine possession de son corps.
Je voudrais rappeler à Marion Maréchal Le Pen que le coût d’une IVG chirurgicale varie de 250 € à 450 € selon les établissements hospitaliers, et qu’il faut débourser au minimum 190 € pour une IVG médicamenteuse pratiquée dans un cabinet médical. Vouloir rembourser intégralement l’IVG, c’est donc la mettre à disposition réelle de celles qui en ont besoin, c’est s’assurer que le paramètre économique ne soit pas une discrimination dans l’accès à la dignité, c’est affirmer enfin que l’état de grossesse non désiré n’est pas une faute mais un accident qui ne s’exprime pas en termes d’inconscience ou d’imprévoyance.
Au vu de l’extrême complexité des situations d’avortement et de la douleur qu’elles génèrent pour les femmes qui les connaissent, que Mme Maréchal Le Pen se rassure : les femmes ne viendront pas en masses se faire avorter pour le plaisir parce que le gouvernement le leur propose à un meilleur tarif.
Imprimer l'article | Cette entrée a été postée par Barbara Romagnan le 14 octobre 2012 à 9 h 08, et placée dans Affaires sociales. Vous pouvez suivre les réponses à cette entrée via RSS 2.0 Les commentaires et les pings sont fermés pour l'instant |
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about 2 years ago
Le droit des femmes à décider d’eux mêmes est un acquis de la loi Weil de 1976!!!
Nous étions dans la rue à Vesoul pour ce droit à l’avortement à cet époque…
Négligence ou laïcité ???