Mon intervention sur la résolution portant création d’une commission d’enquête sur la réduction du temps de travail
Ce matin en commission des affaires sociales, je suis intervenue sur la Proposition de résolution (PPR) de l’UDI tendant à la création d’une commission d’enquête relative à l’impact sociétaire, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail.
Une PPR résulte de ce qu’on appelle le droit de tirage annuel (art.140 et suivants du règlement de l’Assemblée nationale) qui permet à chaque groupe politique, de la majorité comme de l’opposition, de créer une commission d’enquête. L’objet de cette commission d’enquête de 30 membres est de faire un bilan de l’impact des politiques de réduction du temps de travail, par un travail d’auditions, de lectures, de visites sur le terrain, d’une durée de plusieurs mois.
Réduction du temps de travail - Commission des… par barbara-romagnan
Au nom du groupe socialiste, j’ai salué l’initiative de Thierry Benoit et des membres du groupe UDI. J’ai rappelé qu’il était bon d’évaluer les politiques publiques de manière générale et que si cela n’était pas toujours possible l’occurrence des arguments forts plaidaient pour que l’Assemblée le fasse.
En effet, nous avons près 20 ans de recul, si l’on part des lois De Robien en 1996, sont intervenues ensuite les lois Aubry (1998 et 2000), puis de nombreux dispositifs, notamment de défiscalisation des heures supplémentaires, ayant eu un impact sur la RTT. On peut dire également que le chômage de masse qui ronge le pays, ainsi que la croissance atone qui dure, justifiait que l’on explore les différentes possibilités de créer de l’emploi. La PPR s’intéresse aux impacts sociétal, social, économique et financier. Ainsi, elle prend en compte une perspective globale. Il me semble que nous avons là une bonne occasion de remettre ce débat sur la scène publique comme le font les syndicats belges, allemands.
Le travail est aujourd’hui déjà partagé entre ceux qui n’ont pas de travail, ceux qui travaillent trop (la durée réelle d’un temps plein en France est supérieur à 39h selon l’INSEE). Au milieu se trouvent ceux qui travaillent à temps partiel et qui peinent à joindre les deux bouts. Ces travailleurs étant très majoritairement des femmes puisqu’elles représentent 82% des travailleurs à temps partiel. Ce partage induit de la souffrance du côté de ceux qui ne travaillent pas ou pas assez et du côté de ceux qui travaillent trop. Cela a un impact sur les arrêts maladie, l’absentéisme, la qualité et donc sur la productivité et les comptes sociaux. Or, ce partage-là du travail n’a pas été débattu devant et avec les citoyens, c’est le marché et la division du travail sexuel qui en a décidé.
Cette situation n’est pas propre à la France. Dans tous les pays occidentaux, il y a un partage du travail de fait car on produit plus avec moins d’heures de travail. Par exemple aux EU, la durée moyenne de travail, même avant la crise des subprimes, était inférieure à 34 heures, tant les petits boulots sont nombreux. Aux Pays-Bas 75 % des femmes travaillent à temps partiel, en Allemagne 45 %. Quelles perspectives d’avancement leurs sont-elles alors offertes dans leur travail ? Quels revenus si le couple se sépare ?
Le fait de produire autant ou davantage et d’avoir pour cela besoin de moins d’heures de travail est une bonne nouvelle. Cela signifie que, grâce à la productivité et à l’utilisation des machines (ordinateurs, robots …), nombre de tâches pénibles sont épargnées aux hommes et aux femmes. Cela signifie également davantage de temps libre pour les siens, soi-même, des activités citoyennes, bénévoles. Encore faut-il que le travail soit réduit et partagé de façon à ce que chacun puisse vivre décemment, que les gains de productivités soient partagés avec les salariés, les chômeurs, pas uniquement les actionnaires. Cette proposition de résolution est une excellente occasion de discuter de tout cela et de faire de la réduction du temps de travail un outil de baisse du chômage, permettant un rapport au travail amélioré pour le plus grand nombre, une opportunité d’amélioration de la vie de nos concitoyens.
Imprimer l'article | Cette entrée a été postée par Barbara Romagnan le 4 juin 2014 à 18 h 39, et placée dans Affaires sociales. Vous pouvez suivre les réponses à cette entrée via RSS 2.0 Vous pouvez laisser une réponse, ou bien un trackback depuis votre site. |
about 4 months ago
Bravo et merci Barbara d’oeuvrer pour un autre partage du temps de travail. Pas étonnant que tu sois « dans le collimateur de l’Elysée et de Matignon » avec quelques autres députés PS …. comme on peut le lire en page 2 du Canard Enchainé de cette semaine.
J’ai rassemblé à la rubrique Partage du temps de travail de mon site une soixantaine de documents, articles ou contributions particulièrement intéressants sur ce thème. Adresse http://www.retraites-enjeux-debats.org/spip.php?rubrique64
about 4 months ago
Bravo Barbara
about 4 months ago
C’est tres facile pour vous de parler de partage.
Combien gagnez vous ?
Vous allez bientôt ne plus être députée et quel sera votre salaire?
about 4 months ago
Je suis désolé de vous dire que vous faites un contre-sens complet sur la notion de partage du travail que vous confondez avec « répartition du travail ». Voir la phrase: « Le travail est aujourd’hui déjà partagé entre ceux qui n’ont pas de travail, ceux qui travaillent trop ». Je crains que vous ne puissiez pas vraiment apporter quelque chose à cette commission en prenant un tel départ.
Pour être plus positif, si c’est à la réduction du chômage que l’on pense, comment ne pas évoquer une seconde le partage des revenus issus du travail ? Si vous envisagez encore une opération du type 35 h payées 39, regardez les courbes du chômage depuis les lois Aubry et posez-vous des questions. Bien cordialement.
about 4 months ago
Je viens de voir l’admirable Deux jours, une nuit de Jean-Pierre Dardenne. Je ne peux que vous le conseiller. ça peut efficacement remplacer quelques cours d’économie sur la notion de partage du travail.
Bien cordialement.