Le projet de loi relatif à l’égalité femmes-hommes a été présenté par la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, le 3 juillet dernier. J’ai eu l’occasion ici de revenir à plusieurs reprises sur le contenu de ce texte :
- 21 juin 2013 – Loi sur l’égalité femmes-hommes : je serai co-rapporteure sur le volet « égalité professionnelle »
- 3 juillet 2013 – Projet de loi : l’égalité entre les femmes et les hommes dans toutes ses dimensions
- 3 juillet 2013 – « Les femmes sont encore trop souvent perçues comme des mères » : interview à Elle Active
- 12 juillet 2013 – Egalité femmes-hommes : la question des droits familiaux et conjugaux
- 18 septembre 2013 – Egalité femmes-hommes : large majorité au Sénat pour le projet de loi
Alors que le texte a été modifié en première lecture au Sénat et qu’il viendra en débat à l’Assemblée nationale en décembre, je souhaite aujourd’hui revenir sur les auditions locales et nationales. En effet, rapporteure au nom de la Délégation aux Droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, sur la dimension professionnelle – articulation des temps de vie et la lutte contre la précarité traités dans les titres I et II du projet de loi –, j’ai procédé à un certain nombre d’auditions à Paris, aux côtés de Catherine Coutelle, présidente de la Délégation et à Besançon avec des acteurs locaux.
Aussi, différentes pistes ont été évoquées pour enrichir ce texte ou amorcer des études approfondies dans les mois à venir, sachant que plusieurs modifications sont déjà intervenues courant septembre lors de l’examen du texte en première lecture au Sénat.
La liste n’est évidemment pas exhaustive. Elle fait état des principales propositions formulées lors des auditions et ne préfigurent en rien les amendements ou les recommandations qui seront formulées par la Délégation aux Droits des femmes.
Sur l’article 2 relatif à la réforme du CLCA (complément de libre choix d’activité) ou en complément de celui-ci, il nous a été suggéré :
- de tendre vers une indemnisation revalorisée d’un an, partagée en deux, et répartie en périodes de six mois pour chaque parent ;
- de favoriser les formations pendant ce temps de congé, voire de reconnaitre certains compétences acquises par sa/son bénéficiaire (par une forme de validation des acquis de l’expérience) ;
- de changer la terminologie du CLCA qui fait référence à un libre choix qui n’a parfois de libre que le nom (comme la Commission des Lois du Sénat l’a voté) ;
- de rendre le congé paternité obligatoire ou de fixer une interdiction légale de travail d’une semaine pour les pères à l’instar de celle qui est prévue pour les mères (article 1225-29 du code du travail) ;
- de mettre en place une protection juridique afin de prévenir les licenciements des nouveaux pères salariés pendant une durée d’un mois après la naissance de l’enfant ;
- d’autoriser les absences des futurs pères pour les examens prénataux obligatoires (c’est un droit pour les salariées au titre de l’article L 1225-16 du code du travail).
Sur l’article 3 relatif à la modification du code des marchés publics, il nous a été recommandé notamment :
- d’exclure des marchés publics les entreprises condamnées pénalement mais également socialement dans la mesure où les entreprises ne sont jamais condamnées pénalement en tant que personne morale et qu’il est constant que certaines entreprises, dont l’un des membres a été reconnu par exemple coupable de harcèlement sexuel devant les Prud’hommes, ne prennent pas toujours les mesures qui s’imposent pour éviter que cette situation ne se reproduise ;
- de joindre systématiquement à l’acte de candidature d’un marché public, l’attestation de dépôt, auprès de la DIRECCTE (direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi), du rapport de situation comparée (RSC) ;
- de proposer un nouvel indicateur à intégrer au RSC, relatif au nombre de femmes dans les 10 plus hautes rémunérations de l’entreprise ;
- d’engager une réflexion plus large sur les critères d’attribution des marchés publics qui favorisent aujourd’hui très souvent le moins disant social et qui, par conséquent, contribuent à des conditions de travail plus difficiles pour femmes, surreprésentées dans les emplois peu valorisés et les contrats précaires.
Sur l’article 5 qui permet d’utiliser les droits affectés sur le compte épargne temps pour financer des prestations de service, nous avons été alertées notamment sur l’opportunité de réfléchir à une disposition parallèle pour les femmes entrepreneurs, qui en sont de facto exclues.
Sur l’article 6 expérimentant un dispositif à destination des familles monoparentales, il nous a notamment été proposé :
- de communiquer davantage sur le droit au recours gratuit à un huissier pour récupérer les pensions impayées ;
- de créer un moteur officiel de calcul des pensions alimentaires.
Plus généralement, pour lutter contre la précarité des femmes, il nous a été recommandé :
- de revaloriser les métiers majoritairement occupés par des femmes, ainsi que les compétences et pénibilités inhérentes à ces métiers, encore trop peu reconnues (qualité d’écoute, patience, empathie, relations avec le public, etc.) ;
- de lutter contre recours abusif aux contrats à temps partiel ;
- d’ouvrir le droit aux allocations familiales dès le premier enfant.
En supplément des points abordés par le projet de loi, nous avons souhaité nous intéresser à la santé des femmes au travail et à ce titre, nous avons été interpellées sur la nécessité de réaliser des statistiques sexuées notamment sur les risques psychosociaux. Il apparaît également nécessaire d’interroger certaines normes ancrées dans le marché du travail français, qui pèsent plus fortement sur les femmes, tel que le présentéisme, exigence plus difficile pour celles qui doivent encore cumuler une double journée de travail.
D’autres moyens ont été évoqués pour faire progresser l’égalité, tels que la reconnaissance d’un droit à la socialisation impliquant la possibilité d’une entrée à l’école ou dans tout autre mode d’accueil collectif à 2 ans, y compris en cours d’année ; ou encore la requalification sémantique des institutions qui perpétuent la prédominance de la maternité sur la paternité.
Pour poursuivre la réflexion, je souhaite mettre en accès ci-dessous les comptes rendus des auditions réalisées à Paris et à Besançon.
Les comptes rendus des auditions
Audition n°1
collectif nationale pour le droit des femmes (CNDF)Audition n°2
observatoire de la responsabilité sociale des entreprises (ORSE)Audition n°3
« Maman travaille »Audition n°4
laboratoire de l’égalitéAudition n°5
fédération des particuliers employeurs (FEPEM)Audition n°6
agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT)Audition n°7
ergonomesAudition n°7-2
PerfégalAudition n°8
observatoire de la parentalité en entreprises / fondation nationale des sciences politiquesAudition n°9
table ronde « créatrices d’entreprises »Audition n°10
K d’urgenceAudition n°11
association contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT)Audition n°12
association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH)Audition n°13
[ les papas = les mamans ]Audition n°14
BPW France