Le gouvernement souhaite inscrire la lutte contre le déficit budgétaire dans la Constitution. Le projet est de créer une loi cadre de programmation des finances publiques d’au moins trois ans. Ensuite, une loi organique définira le contenu de la loi cadre.

Ce projet de loi de révision de la Constitution  vise à instaurer « une règle d’or » de maîtrise des déficits publics comme l’a annoncé  Nicolas Sarkozy.

Si, le but est, comme l’annonce François Baroin, de « fixer un objectif clair d’équilibre budgétaire à atteindre », on peut s’interroger sur le sens de son inscription dans la Constitution. Pourquoi inscrire dans la Constitution le principe de la maîtrise des déficits ? Gérer les finances publiques avec soin et rigueur relève du bon sens et de l’éthique. Faut-il y substituer une obligation constitutionnelle ?

  • On peut tout d’abord trouver cette proposition pour le moins hypocrite. Elle émane en effet, d’un gouvernement qui a augmenté le déficit budgétaire de 40 à 140 milliards et qui a doublé la dette de la France ! Ce projet n’est il pas d’abord une opération de communication pour dédouaner le gouvernement de cette réalité ?

  • Il est aussi utile de rappeler que l’obligation de limitation des déficits existe déjà dans le pacte de stabilité et de croissance adopté par les pays de la zone euro. C’est une obligation communautaire très contraignante qui s’accompagne de mécanisme de surveillance et de sanctions. Mais elle n’est pas respectée par la France et par les autres pays ! Le traité de Lisbonne prévoit d’ailleurs de l’assouplir. N’est-il pas dangereux de faire inscrire dans la Constitution une obligation que l’on sait ne pas pouvoir tenir ?
  • Enfin et surtout, est-ce le rôle de la Constitution de définir le contenu des politiques publiques ? La Constitution «  organise les pouvoirs publics, définit leur rôle et leurs relations. Elle « constitue » le cadre à l’intérieur duquel sont conduites les politiques publiques mais en aucun cas le contenu de ces politiques. Sinon, cela ne servirait à rien d’aller voter !

Ainsi, sans  préjuger de son intérêt économique, une règle visant à limiter le déficit n’a rien à faire dans la constitution, comme n’aurait également rien à faire dans la constitution des règles visant par exemple à limiter les émissions de gaz à effet de serre ou à assurer l’indépendance énergétique du pays, en encore visant des objectifs chiffrés visant la réduction de la criminalité ou du nombre de cancers, …

En revanche, la Constitution rappelle clairement qu’il appartient au Parlement de contrôler l’action du gouvernement et d’évaluer les politiques publiques, notamment au regard de l’objectif d’équilibre des comptes publics. Aujourd’hui cette évaluation, ce contrôle par le parlement, ne sont pas faits. N’est-ce pas d’abord cela qu’il faut interroger ? Lorsque le Parlement ne joue plus son rôle constitutionnel et lorsque l’on demande à la Constitution de se substituer aux choix des représentants élus, n’est-ce pas la démocratie que l’on affaiblit ?