Archives pour mars, 2016
Siège du tribunal de commerce spécialisé : mon courrier au Premier ministre
11/03/16
Le décret n°2016-217 du 26 février 2016 fixant la liste et le ressort des tribunaux de commerce spécialisés, pris par le Premier ministre et le Garde des Sceaux, fixe à Dijon le siège du tribunal de commerce spécialisé dont ressortent les tribunaux de commerce de Bar-le-Duc, de Belfort, de Besançon, de Briey, de Chalon-sur-Saône, de Chaumont, de Dijon, d’Epinal, de Lons-le-Saunier, de Mâcon, de Nancy, de Vesoul.
Cette décision difficilement compréhensible provoque une légitime colère et de vives interrogations en Franche-Comté. J’ai adressé ce 8 mars un courrier au Premier ministre, Manuel Valls, pour faire part de mon incompréhension et demander à ce qu’une solution pour l’équilibre des territoires soit véritablement trouvée.
En effet, le 27 novembre 2015, la Garde des Sceaux d’alors, Christiane TAUBIRA, a présenté la liste des 18 implantations des nouveaux tribunaux de commerce spécialisés créés par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Il était prévu que Besançon soit doté d’un tel tribunal spécialisé pour les tribunaux de commerce de Bourgogne Franche-Comté. Et ceci, de façon argumentée, comme a pu le démontrer le tribunal de commerce de Besançon dans sa réponse, courant 2015, à l’étude d’impact ou encore dans ses travaux menés depuis août 2015 sous l’égide de la conférence générale des juges consulaires de France.
Ça vous regarde (LCP) : la loi « Travail » en débat
10/03/16
Mercredi 9 mars, j’étais invitée sur le plateau de l’émission « Ça vous regarde » sur LCP (La chaîne parlementaire), aux côtés de Karl Stoekel, délégué du travail et initiateur de la pétition “Loi travail : non merci”, Christophe Caresche, député PS de Paris et Bernard Sagez, secrétaire général confédéral de la CFTF.
Les débats menés par le journaliste Arnaud Ardoin ont porté sur le projet de loi sur le travail, en ce premier jour de mobilisation syndicale contre le texte.
Filière Comté : l’enjeu du collectif
10/03/16
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Le Comté, premier fromage AOP de France, est l’un des fleurons agroalimentaires de notre région. Fruit d’une longue histoire depuis les XIIe et XIII siècles, le Comté est aussi le produit d’une filière ancienne, organisée et solidaire. C’est d’ailleurs l’un des aspects qui m’a le plus étonné et enchanté lorsque je me suis intéressée de plus près aux questions agricoles dans le cadre du travail parlementaire.
Ces dernières semaines, cette belle filière est néanmoins agitée par le débat suscité par l’utilisation d’un robot de traite des vaches dans une exploitation agricole, toléré par une décision de justice mais en contradiction manifeste, si ce n’est avec la lettre, du moins avec l’esprit du cahier des charges du comité interprofessionnel du gruyère de comté (CIGC). En résumé, un seul robot dans une seule exploitation menace le travail collectif des 2600 autres exploitations de la zone AOP. En effet, si le Comté est un produit d’une aussi grande qualité, avec une valeur ajoutée à la fois notable et justement répartie entre tous les acteurs de la filière, du producteur à la grande distribution qui n’a pas son mot à dire sur les prix d’achat, c’est justement parce que l’ensemble de la filière s’est dotée d’un cahier des charges très strict. Ces « valeurs du Comté » ont été réaffirmées solennellement dans un manifeste lors d’une manifestation conjointe des 4 syndicats agricoles organisée à Vercel, en soutien à la coopérative de Pierrefontaine-les-Varans et au CIGC.
Sur la question de la traite des vaches, les règles du cahier des charges révisées en 2015 sont précises : « La traite doit se faire deux fois par jour, le matin et le soir, à des heures régulières de ce fait la traite en libre-service [les vaches viennent se faire traire librement, sans intervention humaine] n’est pas possible. […] Les premiers jets doivent être éliminés ». Pour être encore plus explicite, le CIGC a adopté en novembre 2015 plusieurs résolutions dont la première précise que la traite par robot est interdite et que les premiers jets doivent être éliminés à la main.
Une organisation humaine et coopérative
Au-delà des aspects juridiques du conflit actuel, il me semble essentiel de rappeler les fondamentaux de cette filière, l’enjeu du collectif qui a toujours été mis au centre de façon volontariste et qui ne saurait être mis à mal par des démarches individuelles, au risque, in fine, d’anéantir une patiente construction commune.
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« J’accepte les points de vue divergents, que l’on respecte les miens »
8/03/16
La députée du Doubs, Barbara Romagnan, explique ses choix et ses prises de positions, souvent à la marge du Parti socialiste. Opération recadrage, notamment avec le maire de Besançon qui l’avait ouvertement critiquée.
La Presse Bisontine (LPB) : Début janvier, avec des politiques de gauche, des intellectuels, des personnes de la société civile, vous avez publié une tribune pour demander la tenue d’une primaire à gauche en vue des élections présidentielles. Encore une fois, vous vous démarquez. Pourquoi ?
Barbara Romagnan (BR) : Les primaires sont inscrites dans les statuts du Parti socialiste. Nous avons changé ces statuts avant la désignation de François Hollande donc je ne comprends pas pourquoi on changerait à nouveau les règles maintenant. C’est étrange. On vit une crise démocratique grave où la moitié des gens ne vont plus voter. La majorité – relative – aux dernières élections vote FN et parmi ceux qui votent FN, les jeunes sont nombreux. Depuis 2012, nous avons perdu toutes les élections : les européennes, les municipales, les départementales, les régionales (au niveau national) et les sénatoriales.
LPB : François Hollande ne serait donc pas le meilleur candidat selon vous ?
BR : On ne peut pas dire que le bilan fait que le président sortant est celui qui doit être reconduit. A chaque fois, on (les politiques) dit que l’on a entendu le message mais on ne change jamais rien. On peine à trouver des réponses au chômage. La question climatique n’est pas résolue. La COP21 fut un succès diplomatique mais des territoires continuent à disparaître. Il y a aussi la question des réfugiés. L’idée de la primaire est de mettre en débat les propositions. Seulement après, on trouvera un candidat pour incarner les idées.
LPB : Est-ce imaginable de voir un président débattre lors de primaires à la télévision alors qu’il dirige le pays ? Est-ce son rôle ?
BR : Je comprends mais c’est secondaire. La question que je me pose, c’est : va-t-on avoir un candidat capable de l’emporter ?
LPB : Plus localement, que répondez-vous à Jean-Louis Fousseret, qui dans la Presse bisontine, déclarait au sujet de l’état d’urgence que votre position était « inacceptable » ?
BR : C’est normal que le débat soit passionné. Dans un État démocratique, ce n’est pas inadmissible et inacceptable qu’il puisse y avoir des points de vue différents. D’ailleurs, il y a eu de nombreuses manifestations de citoyens, magistrats, associations, et même des spécialistes du renseignement qui ont dit qu’ils étaient opposés à la prolongation de cet état d’urgence.
LPB : Vous insinuez que vous étiez dans le vrai, les autres non ?
BR : Non, pas du tout. Il y a un point où Jean-Louis Fousseret se trompe lourdement, et c’est embêtant car c’est un responsable politique majeur, c’est celui d’affirmer que sans l’état d’urgence, l’assaut de Saint-Denis n’aurait pu avoir lieu. C’est faux. C’est l’enquête pénale qui a permis l’infiltration, les écoutes… Cela n’a rien à voir avec l’état d’urgence.
Journée des droits des femmes : le Planning familial fête ses 60 ans
8/03/16
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En cette journée du 8 mars consacrée aux droits des femmes, je vous propose de réécouter en podcast l’émission que France Inter a consacré dimanche dernier au Planning familial qui fête ses 60 ans.
Ces témoignages montrent que les combats de cette association créée en 1956 restent plus que jamais d’actualité, malgré des remises en cause récentes de la structure. Ils montrent aussi l’évolution de la structure, ses nouveaux combats et sa vigilance sur les droits acquis. Ils rappellent enfin que le Planning familial n’est pas destiné exclusivement aux femmes mais à toute la famille, et que les hommes ont un espace de parole et un rôle à jouer.
L’émission peut être réécoutée ou téléchargée en podcast via le lien suivant : http://www.franceinter.fr/emission-interception
Bonne écoute !
Cannabis, une répression inefficace
7/03/16
Selon l’observatoire français des drogues et des toxicomanies, 17 millions de Français ont expérimenté le cannabis dans leur vie, tandis que 4,6 millions en consomment occasionnellement et 1,4 million régulièrement. La France est le pays d’Europe où cette consommation est la plus élevée. Elle serait également le pays où le cannabis consommé est le plus nocif, notamment parce qu’il est mélangé avec du tabac. Chacun en convient, la consommation régulière de cannabis présente des dangers pour la santé.
Pourtant, à l’instar du professeur Dautzenberg, pneumologue et tabacologue, il me semble opportun, non seulement de dépénaliser le cannabis, mais aussi de le légaliser. Dépénaliser signifie maintenir l’interdiction de la vente sans poursuivre son usage. Le think tank Terra Nova pronostique également que la baisse de la répression entraînerait des économies, évaluées à 310 millions d’euros. Légaliser la consommation de cannabis permettrait d’aller plus loin dans la prise en charge de ce problème de santé publique.
Au préalable, il faut reconnaître que la légalisation d’une substance que l’on sait pouvoir être nocive pour la santé pose problème, car légaliser est une façon de légitimer et donc pourrait laisser penser que consommer régulièrement du cannabis ne pose pas problème, ce qui est faux. Mais d’une part, il n’est pas illégal de consommer de l’alcool ou du tabac qui ont également des effets nocifs sur la santé - et sans que cela empêche bien entendu de faire de la prévention - d’autre part la législation la plus répressive et prohibitionniste est corrélée en France avec une des consommations les plus élevées. Cela signifie qu’interdire et punir n’est pas forcément la meilleure façon de diminuer la consommation.
Légaliser permet de proposer des produits dont la qualité est contrôlée, permettant ainsi de diminuer l’effet négatif de la consommation. Légaliser permet également la vente dans des lieux sûrs et encadrés, à des personnes honnêtes et à des tarifs accessibles. C’est, en conséquence, une façon de lutter contre la criminalité car les consommateurs n’auraient plus de raison d’entretenir des trafiquants. Et si ces derniers n’y voient plus d’intérêt financier, ils arrêteront de chercher à en vendre, ce qui peut contribuer à la baisse de la consommation. À titre d’exemple sans prétendre tout démontrer, les Pays-Bas où le cannabis est en vente libre compte proportionnellement moins de consommateurs que la France, notamment dans la jeunesse.
Barbara ROMAGNAN
Chronique publiée dans L’Humanité le 7 mars 2016
Agriculture : l’avenir au prix d’un nouvel équilibre des rapports de force
3/03/16
Sous-jacente depuis plusieurs mois, plusieurs années, la crise de secteurs importants de la production agricole française est actuellement à un niveau très aigu. L’angoisse, la détresse parfois, exprimée par de nombreux agriculteurs nécessite de trouver des solutions durables et porteuses d’avenir, à la hauteur des enjeux et de travail irremplaçable réalisé au quotidien par des femmes et ces hommes aux quatre coins de notre territoire, comme en témoigne chaque année leur présence au salon de l’agriculture.
Le constat est largement partagé : hausse des coûts d’exploitation, baisse des prix payés par les transformateurs et les distributeurs, concurrence européenne et mondiale, surproduction, standardisation des produits… Je l’évoquais d’ailleurs dans un billet du 31 juillet 2015 et dans un autre du 14 septembre 2015 pour donner des clés pour comprendre cette crise agricole. Après une courte amélioration mi-2015, la situation s’est encore dégradée depuis, avec un nouveau repli des prix, qui ne couvrent plus les coûts de production.
C’est la raison pour laquelle la FDSEA et les Jeunes agriculteurs du Doubs ont organisé une réunion il y a une dizaine de jours à Cussey-sur-l’Ognon, où étaient invités autour d’une même table agriculteurs, transformateurs, grande distribution et parlementaires locaux. En effet, hors zone de production AOP, notre région connaît les mêmes difficultés que le reste de l’agriculture dite « standard » du pays. Ce rendez-vous aura permis de rendre concrets ces problèmes et de fournir davantage de transparence dans les relations locales. Toutefois, et au-delà des bonnes pratiques en vigueur dans les territoires pour des approvisionnements régionaux en viande à vif servie dans des rayons boucherie dont les consommateurs se détournent, les enjeux demeurent à un niveau au moins national. En effet, ce sont d’abord et avant tout les grands transformateurs et les centrales d’achat de la grande distribution qui détiennent une part notable de la solution.
Le gouvernement et la loi du marché
1/03/16
Le projet de réforme du code du travail diminue considérablement la place de la loi et donc de l’Etat dans la régulation du temps de travail, d’une part en élevant les plafonds de travail horaire de la journée, de la semaine, des apprentis et en permettant la modulation du temps de travail sur une période pouvant aller jusqu’à 3 ans contre un an aujourd’hui, d’autre part en confiant de plus en plus le choix de ces horaires aux partenaires sociaux, au niveau de l’entreprise, voire au patron seul dans le cas des entreprises de moins de 50 salariés.
Le gouvernement semble faire sienne cette idée que l’Etat ne devrait pas, ou le moins possible, s’occuper de la durée du travail. Les raisons sous-jascentes à ce choix sont de différents ordres : cela serait illégitime (l’Etat n’est pas là pour ça), inutile (les entreprises et les travailleurs peuvent s’arranger entre eux), voire dangereux (l’Etat perturbe la bonne organisation des entreprises et des travailleurs). En somme, se mêler de la durée du temps de travail reviendrait au fond à perturber une sorte de régulation naturelle optimum et à pratiquer un partage artificiel du travail.
Aujourd’hui le travail est partagé, entre ceux qui travaillent à temps plein en moyenne plus de 39 heures par semaine (Insee), ceux qui travaillent 0 heures, parce qu’ils sont au chômage ou à temps partiel sans pouvoir en vivre. Dans ce partage, le rôle du marché est déjà considérable et il donne un résultat inéquitable. Diminuer encore la place de la loi, limiter les bornes fixées au marché et augmenter la place de la négociation au niveau où les partenaires sociaux, quand ils existent, sont les plus faibles, le tout dans un contexte de chômage massif et durable fait prendre de grands risques à notre société, celui d’augmenter encore le chômage et la précarité, d’affaiblir le lien social et le sentiment d’appartenance à une communauté de destin où chacun à sa place.
En 1950, les Français travaillaient 2230 heures par an, contre environ 1650 aujourd’hui ( Insee 2013). Si les temps-pleins étaient restés les mêmes que dans les années 1950, le travail aurait été concentré au sein d’un plus petit groupe social, mettant une proportion encore plus importante de travailleurs au chômage. Ce qu’un gouvernement de gauche pourrait s’appliquer à faire, dans un dialogue avec les partenaires sociaux, c’est mettre en place une politique de meilleure répartition du temps de travail disponible, en même temps que l’indispensable répartition des richesses.
Barbara ROMAGNAN
Chronique publiée dans L’Humanité le 29 février 2016