Archives pour mars, 2016

Siège du tribunal de commerce spécialisé : mon courrier au Premier ministre

Le décret n°2016-217 du 26 février 2016 fixant la liste et le ressort des tribunaux de commerce spécialisés, pris par le Premier ministre et le Garde des Sceaux, fixe à Dijon le siège du tribunal de commerce spécialisé dont ressortent les tribunaux de commerce de Bar-le-Duc, de Belfort, de Besançon, de Briey, de Chalon-sur-Saône, de Chaumont, de Dijon, d’Epinal, de Lons-le-Saunier, de Mâcon, de Nancy, de Vesoul.

Cette décision difficilement compréhensible provoque une légitime colère et de vives interrogations en Franche-Comté. J’ai adressé ce 8 mars un courrier au Premier ministre, Manuel Valls, pour faire part de mon incompréhension et demander à ce qu’une solution pour l’équilibre des territoires soit véritablement trouvée.

En effet, le 27 novembre 2015, la Garde des Sceaux d’alors, Christiane TAUBIRA, a présenté la liste des 18 implantations des nouveaux tribunaux de commerce spécialisés créés par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Il était prévu que Besançon soit doté d’un tel tribunal spécialisé pour les tribunaux de commerce de Bourgogne Franche-Comté. Et ceci, de façon argumentée, comme a pu le démontrer le tribunal de commerce de Besançon dans sa réponse, courant 2015, à l’étude d’impact ou encore dans ses travaux menés depuis août 2015 sous l’égide de la conférence générale des juges consulaires de France.

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« J’accepte les points de vue divergents, que l’on respecte les miens »

La députée du Doubs, Barbara Romagnan, explique ses choix et ses prises de positions, souvent à la marge du Parti socialiste. Opération recadrage, notamment avec le maire de Besançon qui l’avait ouvertement critiquée.

La Presse Bisontine (LPB) : Début janvier, avec des politiques de gauche, des intellectuels, des personnes de la société civile, vous avez publié une tribune pour demander la tenue d’une primaire à gauche en vue des élections présidentielles. Encore une fois, vous vous démarquez. Pourquoi ?

Barbara Romagnan (BR) : Les primaires sont inscrites dans les statuts du Parti socialiste. Nous avons changé ces statuts avant la désignation de François Hollande donc je ne comprends pas pourquoi on changerait à nouveau les règles maintenant. C’est étrange. On vit une crise démocratique grave où la moitié des gens ne vont plus voter. La majorité – relative – aux dernières élections vote FN et parmi ceux qui votent FN, les jeunes sont nombreux. Depuis 2012, nous avons perdu toutes les élections : les européennes, les municipales, les départementales, les régionales (au niveau national) et les sénatoriales.

LPB : François Hollande ne serait donc pas le meilleur candidat selon vous ?

BR : On ne peut pas dire que le bilan fait que le président sortant est celui qui doit être reconduit. A chaque fois, on (les politiques) dit que l’on a entendu le message mais on ne change jamais rien. On peine à trouver des réponses au chômage. La question climatique n’est pas résolue. La COP21 fut un succès diplomatique mais des territoires continuent à disparaître. Il y a aussi la question des réfugiés. L’idée de la primaire est de mettre en débat les propositions. Seulement après, on trouvera un candidat pour incarner les idées.

LPB : Est-ce imaginable de voir un président débattre lors de primaires à la télévision alors qu’il dirige le pays ? Est-ce son rôle ?

BR : Je comprends mais c’est secondaire. La question que je me pose, c’est : va-t-on avoir un candidat capable de l’emporter ?

LPB : Plus localement, que répondez-vous à Jean-Louis Fousseret, qui dans la Presse bisontine, déclarait au sujet de l’état d’urgence que votre position était « inacceptable » ?

BR : C’est normal que le débat soit passionné. Dans un État démocratique, ce n’est pas inadmissible et inacceptable qu’il puisse y avoir des points de vue différents. D’ailleurs, il y a eu de nombreuses manifestations de citoyens, magistrats, associations, et même des spécialistes du renseignement qui ont dit qu’ils étaient opposés à la prolongation de cet état d’urgence.

LPB : Vous insinuez que vous étiez dans le vrai, les autres non ?

BR : Non, pas du tout. Il y a un point où Jean-Louis Fousseret se trompe lourdement, et c’est embêtant car c’est un responsable politique majeur, c’est celui d’affirmer que sans l’état d’urgence, l’assaut de Saint-Denis n’aurait pu avoir lieu. C’est faux. C’est l’enquête pénale qui a permis l’infiltration, les écoutes… Cela n’a rien à voir avec l’état d’urgence.

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Le gouvernement et la loi du marché

Le projet de réforme du code du travail diminue considérablement la place de la loi et donc de l’Etat dans la régulation du temps de travail, d’une part en élevant les plafonds de travail horaire de la journée, de la semaine, des apprentis et en permettant la modulation du temps de travail sur une période pouvant aller jusqu’à 3 ans contre un an aujourd’hui, d’autre part en confiant de plus en plus le choix de ces horaires aux partenaires sociaux, au niveau de l’entreprise, voire au patron seul dans le cas des entreprises de moins de 50 salariés.

Le gouvernement semble faire sienne cette idée que l’Etat ne devrait pas, ou le moins possible, s’occuper de la durée du travail. Les raisons sous-jascentes à ce choix sont de différents ordres : cela serait illégitime (l’Etat n’est pas là pour ça), inutile (les entreprises et les travailleurs peuvent s’arranger entre eux), voire dangereux (l’Etat perturbe la bonne organisation des entreprises et des travailleurs). En somme, se mêler de la durée du temps de travail reviendrait au fond à perturber une sorte de régulation naturelle optimum et à pratiquer un partage artificiel du travail.

Aujourd’hui le travail est partagé, entre ceux qui travaillent à temps plein en moyenne plus de 39 heures par semaine (Insee), ceux qui travaillent 0 heures, parce qu’ils sont au chômage ou à temps partiel sans pouvoir en vivre. Dans ce partage, le rôle du marché est déjà considérable et il donne un résultat inéquitable. Diminuer encore la place de la loi, limiter les bornes fixées au marché et augmenter la place de la négociation au niveau où les partenaires sociaux, quand ils existent, sont les plus faibles, le tout dans un contexte de chômage massif et durable fait prendre de grands risques à notre société, celui d’augmenter encore le chômage et la précarité, d’affaiblir le lien social et le sentiment d’appartenance à une communauté de destin où chacun à sa place.

En 1950, les Français travaillaient 2230 heures par an, contre environ 1650 aujourd’hui ( Insee 2013). Si les temps-pleins étaient restés les mêmes que dans les années 1950, le travail aurait été concentré au sein d’un plus petit groupe social, mettant une proportion encore plus importante de travailleurs au chômage. Ce qu’un gouvernement de gauche pourrait s’appliquer à faire, dans un dialogue avec les partenaires sociaux, c’est mettre en place une politique de meilleure répartition du temps de travail disponible, en même temps que l’indispensable répartition des richesses.

Barbara ROMAGNAN

Chronique publiée dans L’Humanité le 29 février 2016