ComtéComme tous les ans, les fédérations départementales des coopératives laitières (FDCL) du Doubs et du Jura se réunissent conjointement pour la séance plénière de leur assemblée générale. Cette réunion, à laquelle je me suis rendue, avait lieu ce jeudi 4 avril à Frasne.

Les fédérations départementales des coopératives laitières fédèrent et représentent les coopératives productrices de lait. Elles sont réunies au niveau national dans une fédération nationale.

En France, 60 groupes coopératifs et près de 200 coopératives « fruitières » collectent et valorisent le lait produit par leurs associés-coopérateurs. Plus de la moitié des 76 000 producteurs de lait en France sont les associés d’une coopérative laitière. Il s’agit pour les différents acteurs de promouvoir le modèle coopératif : un modèle économique performant, équitable, durable, humaniste et solidaire, qui répond aux aspirations de nombreux consommateurs-citoyens.

Alain Mathieu, président de la FDCL du Jura et Bernard Marmier, président de la FDCL du Doubs ont pu accueillir Jean-Paul Delevoye, président du Conseil économique, social et environnemental (CESE) et Daniel Costantini, ancien entraîneur de l’équipe de handball masculine, premier entraîneur à avoir amené une équipe nationale d’un sport collectif au titre de champion du monde. L’occasion de débattre autour du thème « L’après quotas, le match à gagner : pas d’autre choix que le collectif ! ».

En effet, instaurés en 1984 par deux règlements du Conseil européen, le dispositif réglementaire des quotas avait pour but de limiter le déséquilibre entre l’offre et la demande sur le marché du lait et des produits laitiers. La suppression des quotas laitiers par l’Union européenne est programmée pour 2015 mais elle est déjà en vigueur puisque les quantités de lait octroyées aux producteurs dépassent largement les possibilités d’absorption par le marché des appellations d’origine protégée (AOP).

ComtéAujourd’hui, il est donc indispensable pour tous les acteurs de la filière d’écrire ensemble cette page blanche qui s’ouvre, en ayant une réflexion globale. Il s’agit à la fois d’un grand risque – celui de cette dérégulation totale dont on sait qu’elle peut entraîner les pires déséquilibres – mais aussi d’une opportunité de mobilisation collective pour consolider un modèle, celui de la coopération et du partage équitable de la valeur ajoutée. Après une année 2012 qui a été l’année internationale des coopératives, c’est un beau défi à relever et qui doit ancrer encore davantage les fruitières dans leur territoire. C’est aussi tout l’enjeu du fonds d’investissement « Coop’invest » créé en 2007 par les FDCL 25-39 et qui a été doté de 3 M€ de capitaux apportés par les coopératives laitières comtoise. Sa raison d’être : investir dans des projets structurants pour conserver l’équilibre de la filière et en garder la maîtrise localement, comme avec la société « Monts et Terroirs » issue de Juragruyère après sa vente par le groupe Entremonts alors en difficulté en 2008-2009 au groupe coopératif Sodiaal. « Coop’invest » a participé au tour de table en apportant des capitaux.

Autre enseignement de la matinée : la nécessité d’intensifier le travail auprès des jeunes agriculteurs, qui n’ont pas forcément spontanément l’esprit « coopérative ». En effet, les jeunes sont d’abord concentrés sur la réussite de leur installation, les projets de transformation et d’évolution de l’exploitation. Pourtant, dans une période plutôt favorable pour le prix du lait à Comté comme actuellement, il faut défendre le modèle coopératif qui permet la mise en commun de moyens – notamment financiers – pour être plus forts ensemble, partager les fruits de la réussite et surmonter plus facilement les difficultés.

Jean-Paul Delevoye

Jean-Paul Delevoye, président du CESE

Cette lutte contre l’individualisme naturel anime les dirigeants des coopératives laitières. Avec l’abandon des quotas, ils souhaitent réaffirmer les grands principes qui ont fait le succès de la filière Comté : 1 homme ou 1 femme = 1 voix dans l’esprit coopératif, il faut chercher à produire mieux avant de produire plus et dans une région où la compétitivité de la filière ne peut pas se faire sur le prix, elle doit se faire sur la différenciation et la valeur ajoutée.

Dans leurs interventions, Jean-Paul Delevoye et Daniel Costantini ont pu apporter leur éclairage particulièrement pertinent sur la période que nous traversons. Période de crises, mais aussi et surtout de métamorphose aux multiples défis. La coopération, les coopératives permettent d’échapper au temps court, à la dictature de l’instant et permettent de mieux partager les richesses. Des qualités à promouvoir.