Politique
La Presse Bisontine, juin 2013 : interview
21/05/13
« Je suis rétive à la discipline »
On ne bâillonne pas Barbara Romagnan. La députée socialiste du Doubs use de sa liberté de parole pour faire avancer des débats sur le non-cumul des mandats ou la transparence dans l’utilisation de l’argent public par les parlementaires. Selon elle, la reconquête de la confiance des Français passe aussi par là.
La Presse Bisontine : Vous avez récemment déclaré à Médiapart vous sentir mal à l’aise au Parti Socialiste. D’où vient ce mal-être ?
Barbara Romagnan : Lorsqu’on est nombreux, la diversité des positions est plus probable. Il y a des moments de grande satisfaction sur la politique nationale comme la couverture maladie universelle (C.M.U.) ou la parité. Il y en a d’autres, plus difficiles, quand on se dit qu’on appartient aussi au parti de Jean-Noël Guérini qui n’en a toujours pas été exclu.
Le fait de pouvoir exprimer un malaise ne dit rien de la loyauté que l’on peut exprimer vis-à-vis de membres du P.S. Le doute est à mon sens utile et nécessaire à une organisation politique. Je me sens d’abord de gauche avant d’être socialiste. Ce qui m’intéresse, c’est l’union de la gauche.
L.P.B. : Vous vous êtes abstenue sur le vote concernant le projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi. Vous avez voté contre le traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance. Pourquoi ?
B.R. : Concernant le texte sur la sécurisation de l’emploi, j’ai rencontré les syndicats, j’ai fait mon travail de parlementaire, j’ai participé aux débats avec sérieux. Si je me suis abstenue, c’est parce que je ne suis pas satisfaite du résultat. La philosophie du texte est de dire qu’il faut plus de flexibilité sur le marché de l’emploi. Je n’y crois pas. Ceci étant, je ne retire pas de fierté particulière de m’être abstenue. Pour ce qui est du débat sur le traité européen, il a eu lieu. Mais ce n’est pas parce qu’il a eu lieu que j’avais obligation de voter comme le groupe.
L.P.B. : Comprenez-vous que le fait que vous ne respectiez pas toujours la discipline du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale dérange vos collègues et des militants ?
B.R. : Ce n’est pas parce que la majorité du groupe socialiste a une position que cela suffit à faire la mienne. Je suis rétive à la discipline, mais soucieuse en revanche de la solidarité du groupe. Nous sommes toujours tiraillés entre le parti auquel on appartient, les orientations du gouvernement, les engagements du président de la République et ses convictions personnelles. Je comprends que ma façon d’agir dérange parfois des camarades, je ne suis moi-même pas certaine d’avoir raison dans cette façon de faire. Mais à l’inverse, il y a aussi nombre de militants au P.S. qui se sentent blessés par l’attitude de leurs responsables et qui se reconnaissent dans ma démarche.
L.P.B. : Que répondez-vous à ceux qui prétendent que votre seul objectif est de vous faire remarquer, de faire parler de vous ?
B.R. : Je n’oublie pas ce qui fait que je suis élue ! Je ne suis pas ingrate, je ne crache pas dans la soupe. Je ne prends pas une position dissonante dans le but de me faire remarquer. Je cherche à faire admettre qu’on puisse avoir une part de doute et que les choses ne sont pas blanches ou noires sur certains sujets. Ce n’est pas parce qu’on vote différemment qu’on est en rupture avec son groupe.
L.P.B. : Vous militez pour plus de transparence dans l’utilisation des réserves parlementaires par les députés. Vous en agacez beaucoup à gauche avec ce sujet. Pourtant, la transparence ne devrait-elle pas relever du bon sens surtout dans le contexte actuel ?
B.R. : Dans le groupe socialiste, 90 % des députés reçoivent 130 000 € par an au titre de la réserve parlementaire. Cette égalité de traitement est nouvelle. C’est un premier point. En revanche, la transparence reste au bon vouloir de chaque député. C’est ce que je conteste car il s’agit d’argent public. Quand j’ai été élue, j’ai dit que je réserverais cette enveloppe aux projets qui concernent l’enfance, la santé et le développement durable. J’ai publié cela. C’est le minimum que l’on puisse faire sachant que dans la plus petite des mairies, chaque euro utilisé doit être justifié.
Or, quelle légitimité a un député pour attribuer cet argent, seul, à des associations par exemple ou pour soutenir tel ou tel projet ? Cet argent public pourrait être mal utilisé. Selon moi, ces enveloppes devraient revenir aux collectivités. La logique serait plutôt celle-là.
Transparence de la vie publique : la réflexion avant l’action
26/04/13
Le cas de Jérôme Cahuzac a été le déclencheur d’une réflexion sur la transparence et les conflits d’intérêt plus largement. D’autres affaires ont régulièrement ouvert ce débat. Dire que l’affaire Cahuzac est seulement la faute d’un homme ne suffit pas à exonérer le système de ses responsabilités, cela montre au contraire à quel point, en l’état, les réglementations ne permettent pas de prévenir ce genre d’abus. La confiance accordée par le Gouvernement à ses ministres est une chose normale et souhaitable, mais elle ne s’oppose en rien à un renforcement des règles par ailleurs, ainsi que l’a judicieusement amorcé le Gouvernement.
La métaphore de la transparence est utilisée pour rendre compte de l’accessibilité directe par le citoyen à des informations qui lui permettraient de constater l’absence de conflits et l’absence d’irrégularités dans le fonctionnement de l’Etat, sur le plan national comme sur le plan local. La transparence est donc avant tout une forme paroxystique d’accessibilité des informations. Mais elle n’est pas sans poser de questions. Le risque est grand en effet de migrer du tout opaque au tout transparent. J’aimerais rappeler que la mise à disposition de moyens, et parfois de moyens financiers conséquents est une chose normale en démocratie. La République justifie que l’on y consacre des fonds conséquents, sans quoi les élus, les administrations et les différentes instances dépositaires de l’autorité publique seraient empêchés dans la réalisation de leur mission de service public et, de fait, accessibles à la corruption ou à d’autres formes de détournements.
Quels que soient notre indignation et notre désir de probité, une longue période de carence du contrôle ne saurait pour autant justifier le parti pris du tout public, au risque sinon de passer du manque d’information à une profusion inexploitable d’informations sans pertinence. La transparence n’a pas pour vocation de plonger le citoyen dans l’abondance d’information, il faut au contraire que les données rendues publiques aient une cohérence, un sens politique, et soient en lien direct avec l’exercice du pouvoir. A cet égard, je me méfie par principe de la transparence totale qui est un mythe, et même un mythe éventuellement démagogue car il laisse penser qu’en publiant tout, les citoyens seront nécessairement mieux informés.
Au contraire, la transparence, pour être un progrès de démocratie, doit épouser un périmètre pertinent au regard des charges publiques des élus. D’une part, doivent être soumis à un contrôle les informations ayant trait à l’argent public, issu de l’impôt. Si l’existence de moyens financiers laissées à disposition des élus pour permettre de mener à bien leurs charges publiques est normale et souhaitable, leur bon emploi doit être contrôlé, de la manière la plus rigoureuse possible. Dans le cas de l’IRFM (indemnité représentative de frais de mandat) par exemple, il serait normal que soient publiées les affectations des fonds et les principaux postes de dépense. L’IRFM est distinct du salaire et ne relève donc en aucun cas de la sphère privée, les citoyens ont donc un droit à constater son juste emploi.
« En direct de Mediapart » : l’affaire Cahuzac et la moralisation de la vie publique
7/04/13
Mediapart organisait vendredi 5 avril un débat en direct avec plusieurs jeunes élu-e-s de gauche autour de la question « Où va la France ? » après l’affaire Cahuzac.
J’ai répondu aux questions d’Edwy Plenel, de Frédéric Bonnaud et des journalistes de la rédaction de Mediapart, aux côtés d’Emmanuelle Cosse, vice-présidente EELV du conseil régional d’Île-de-France, Alexis Bachelay, député PS, Ian Brossat, président du groupe Front de gauche au Conseil de Paris, Emmanuel Maurel, vice-président PS du conseil régional d’Île-de-France et Gwendal Rouillard, député PS.
Je vous propose de trouver le condensé de mes interventions lors de ce débat, que j’ai dû quitter pour rejoindre l’hémicycle de l’Assemblée nationale afin de débattre du projet de loi de sécurisation de l’emploi sur lequel j’ai travaillé et présenté des amendements.
En direct de Mediapart - Où va la France ? - 5 avril 2013 par barbara-romagnan
Et voilà l’émission en intégralité :
Intervention de François Hollande
29/03/13
A l’occasion de l’interview en direct hier sur France 2, François Hollande est revenu sur la situation actuelle en faisant le point tant sur la politique menée depuis maintenant 10 mois que sur les perspectives à venir. Sous une forme différente de la conférence de presse du 13 novembre 2013, le chef de l’État a expliqué la politique du Gouvernement et rendu compte aux Français des mesures mises en œuvre. La crise que nous traversons depuis 2008 est une crise profonde, qui nécessite des réformes structurelles.
Davantage que l’annonce de nouvelles mesures, cet échange a permis de rappeler les objectifs et d’en détailler les étapes. La politique que nous menons s’envisage et s’organise sur un temps long. C’est dans ce cadre-là qu’elle doit être jugée.
En matière de lutte contre le chômage, le président a rappelé les dispositifs déjà mis en place : les emplois d’avenir et les contrats de génération qui seront déployés pleinement dans les mois à venir ; le Pacte de compétitivité qui permet de préserver l’investissement des entreprises ; la création de la Banque publique d’investissement pour favoriser le développement des filières d’avenir.
Concernant l’Union européenne, le président de la République a énoncé les ambitions que nous devons nourrir à l’égard du projet de construction européenne, aux antipodes de son avatar appauvri qu’est l’austérité budgétaire aveugle prônée par les conservateurs. La récession concerne l’Europe dans son ensemble, les solutions sont donc à rechercher à l’échelle continentale si l’on veut donner aux mesures économiques une réelle cohérence politique.
Par ailleurs, François Hollande a rappelé que, comme il s’y est engagé et outre les évolutions de la TVA applicables au 1er janvier, les prélèvements fiscaux ne seront pas augmentés en 2014. Les efforts ont été demandés à tous, et en particulier aux foyers et entreprises les plus aisés, au début du quinquennat.
L’urgence de la situation, sa très grande dureté pour beaucoup de nos concitoyens de même que l’impatience de voir cette situation s’inverser ne doivent pas nous aveugler quant à la politique à mener : les mesures que nous prenons ne peuvent régler en l’espace de 10 mois toutes les difficultés engendrées par une crise qui dure depuis 5 ans.
Cette urgence, cette impatience ne doivent pas non plus nous conduire à des excès inutiles et dommageables pour les convictions républicaines qui doivent nous rassembler. En ce sens, je veux également saluer la volonté d’apaisement du président de la République, qui constitue une nécessité face aux radicalisations que produisent les crises.
Je suis toutefois beaucoup plus réservée sur le choix de poursuivre la baisse des dépenses publiques alors même que le taux de croissance est très faible, celui du chômage élevé et que le budget européen est en berne. Il ne s’agit pas, bien sûr de les augmenter de façon inconsidérée, mais de ne pas aggraver une situation sociale extrêmement difficile. De même l’allongement de la durée de cotisation, alors que deux tiers des salariés sont licenciés au-delà de 55 ans et que le taux de chômage des jeunes est si élevé ne me paraît pas aller de soi, même si la durée de vie s’allonge.
Enfin, si je salue le fait que la réforme du cumul des mandats verra bien le jour avant la fin du quinquennat puisqu’elle sera présentée lors du conseil des ministres du mercredi 3 avril prochain, je regrette que François Hollande n’ait pas dit plus clairement si elle s’appliquerait dès les municipales de 2014.
Pour une parole politique plus modeste, authentique et coopérative à gauche
17/03/13
Au fil des mois, je m’inquiète de l’émergence de la violence verbale et de l’insulte au sein du débat de la gauche. Je veux ici dénoncer en particulier les propos outranciers et les attaques sur la personne du Président de la République dans certaines déclarations du co-président du Front de gauche.
Je tiens à rappeler le danger mortel qu’il y aurait pour une composante de la gauche d’espérer gagner contre l’autre en souhaitant sa défaite. L’enjeu de la qualité démocratique d’un projet de gauche pluraliste exige dès aujourd’hui une parole politique plus modeste, plus authentique et plus coopérative en faisant une place à des espaces de débats et de dialogue loin des postures médiatiques.
France Bleu Besançon : réécouter le « Forum des auditeurs »
9/03/13
Mardi 5 mars, j’étais l’invitée de France Bleu Besançon et de son forum des auditeurs, de 8h10 à 8h30, en direct.
Il a été question de l’actualité nationale avec le projet de loi de sécurisation de l’emploi et de deux autres sujets qui me tiennent à coeur : la transparence de la réserve parlementaire et le non cumul des mandats.
Je vous propose de réécouter l’émission et de retrouver ci-dessous la transcription de mes principales déclarations.
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Accord national interprofessionnel - Projet de loi sur la sécurisation de l’emploi
Je suis vigilante et inquiète. Il y a eu un accord entre des partenaires sociaux, mais pas tous. Ça ne le rend pas illégitime pour autant. Je continue à lire et à travailler le texte, à rencontrer les syndicats - ceux qui sont pour et ceux qui sont contre -, y compris les syndicats patronaux. Et je vais avec mes collègues, essayer de jouer mon rôle de parlementaire pour faire que le texte soit aussi amélioré. C’est normal que la démocratie sociale fonctionne, mais la démocratie politique aussi. C’est normal que les parlementaires se saisissent notamment des questions de droit du travail.
« Barbara Romagnan, sans réserve » : portrait dans Libération
28/02/13
LES NOUVEAUX VISAGES DE L’ASSEMBLÉE
Toutes les semaines, Libération.fr dresse le portrait d’un des 217 primodéputés. Aujourd’hui, l’élue du Doubs chantre de la transparence et du non-cumul.
Par CHARLOTTE ROTMAN

Barbara Romagnan, à l'université d'été du PS, le 25 août 2012, à La Rochelle. (Photos Jean-Pierre Muller. AFP et Charles Platiau. Reuters)
Elle n’a vraiment pas l’impression de faire un truc extraordinaire. Plutôt, « le minimum démocratique vital ». Est-ce pour cela qu’elle ne se départit pas d’un sourire amusé ? Barbara Romagnan a rendu publique l’utilisation de sa réserve parlementaire. Cette enveloppe de subventions votée dans la loi de finances permet aux députés et sénateurs de financer des opérations d’intérêt local, associations ou projets. Sauf que sa répartition et son utilisation restent opaques. Son existence même est contestée.
« Dans une mairie, un euro qui rentre, un euro ou qui sort, tout doit être justifié. Là, c’est pareil : ce n’est pas notre argent… », argumente la députée du Doubs. Elle a choisi d’aider des projets qui correspondent aux priorités qu’elle a affichées lors de sa campagne électorale, notamment la petite enfance, l’éducation, la santé, et a tout publié sur son site. Elle n’est pas la seule, et d’autres députés lui ont emboîté le pas. Mais cet effort de transparence demeure rare. Pourtant, « ces signes, simples et qui ne coûtent rien, sont de nature à redonner un peu confiance en la politique .»
Engagée pour la « moralisation de la vie politique », Barbara Romagnan, 39 ans, se bat également pour la fin du cumul des mandats. Une fois élue députée, elle-même a démissionné de son mandat de conseillère générale. « Mon canton a toujours été très à gauche, alors que ma circonscription, ce n’est pas sûr que je la récupère. Mais c’est comme ça que les gens peuvent avoir confiance. J’applique ce que je raconte. »
Cela ne passe pas toujours. « Sur le cumul, on me l’a beaucoup renvoyé, c’est souvent interprété comme si je faisais la morale à tout le monde. » Comme si, en assumant de « rendre des comptes », elle désignait les réfractaires, les traîne-savates. Pourtant, jure-t-elle, ces « enjeux démocratiques » sont faciles à traduire dans un texte de loi et dans les pratiques, sans ouvrir pour autant « une chasse aux sorcières ».
Et puis, elle ne se présente pas en valeureuse et pure chevalière. « Quand je fais une intervention, je dis d’où je parle. Comme il y a quelques jours, à Lons-le-Saunier, devant des jeunes élus, sur la moralisation de la vie politique et le cumul des mandats, j’ai pris soin de me présenter : quand on est une femme, jeune, on a aussi intérêt à ce que les postes se libèrent. »
« Libé » avait suivi ses premiers pas à l’Assemblée. Huit mois après, cette docteure en sciences politiques et enseignante revendique encore un droit à la transition. « Il y a des choses que je ne gère toujours pas très bien. Et encore, je ne fais rien d’autre que députée. » Elle n’a pas voulu d’un siège au bureau national du PS, mais elle est membre de la commission des affaires sociales et de la délégation droits des femmes. Elle veut, aussi, faire vivre l’aile gauche dont elle est l’une des têtes d’affiche ou porter le credo écolo de la gauche durable. Souvent, il lui faut choisir entre des réunions concomitantes. « Il faut que je me limite davantage » avoue-t-elle. Sans compter sa vie personnelle qu’elle essaye de préserver. « Je ne cumule pas mais je tiens à aller chercher ma fille à l’école quand je peux, par exemple le jeudi quand je reviens à Besançon. On a besoin de temps pour soi et de compenser avec sa famille une forme de distance nouvelle ».
Les députés assidus s’avalent réunions, textes, séances, elle confesse aussi avoir « besoin de souffler, de lire plus ou d’aller boire un verre. » Elle ne s’en cache pas: c’est bien si « la vie qu’on mène se rapproche de celles des électeurs » qui « comprennent mais attendent aussi de nous qu’on soit présents ».
A l’Assemblée où elle s’est prononcée contre le traité, mais pour la procréation médicalement assistée, Barbara Romagnan essaye de vivre le moins mal possible le « décalage » qui peut parfois exister entre les engagements de François Hollande, les siens, et la solidarité de groupe qu’elle juge «essentielle». Elle a mal au cœur quand elle abandonne un amendement dans le texte sur le délit de solidarité auquel elle croyait mais se ressource en écoutant Taubira sur le mariage pour tous. Elle a aussi voté la réforme du mode de scrutin aux élections locales, adoptée ce mardi, et qui permettra d’assurer une représentation paritaire dans les conseils départementaux.
Hommage à un éternel défenseur des droits de l’Homme
27/02/13
Il n’aura cessé de le dire, de l’écrire, de le répéter : nous devons chaque jour nous battre pour que la Déclaration universelle des droits de l’Homme soit, à chaque instant, un peu plus appliquée et permette à chacun le respect de la dignité de l’égalité et de la liberté qui lui dû de par son humanité.
Cet indigné perpétuel des violations quotidiennes de ces droits, ce grand résistant à toute injustice nous quitte aujourd’hui au terme d’un parcours infiniment marqué par les valeurs humanistes qu’il a portées.
Son indignation manquera. Je présente toutes mes condoléances à sa famille et à ses proches.
De l’initiative à l’application effective d’une loi : l’exemple du mariage pour tous les couples
13/02/13
Comme je le ferai régulièrement, je souhaite expliquer concrètement comment se déroule le travail parlementaire, de quels outils et procédures disposent les députés, comment j’utilise les moyens matériels et financiers mis à notre disposition. En même temps que l’exigence de rendre compte de mon mandat en toute transparence, j’y vois là aussi un moyen de faire de la pédagogie sur l’exercice de la démocratie. Ici, il est question du parcours d’une loi, de l’initiative à son application effective, en prenant l’exemple du projet de loi relatif à l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe.
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Ce mardi 12 février après-midi, nous avons adopté « en première lecture » le projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe. Je ne reviendrai pas sur mes convictions à l’égard de ce texte, que j’ai soutenu et continuerai à soutenir sans ambiguïté.
En premier lieu, il importe nécessairement d’avoir « l’idée » de cette loi, ce qui en constituera l’essence ou en d’autres termes « le fond » du texte. En l’occurrence, mardi, l’objet du texte était relatif à la possibilité nouvelle pour un couple de personnes de même sexe de se marier et d’adopter un enfant.
De façon générale, ces idées sont d’origine diverses : revendications sociales, travaux d’analyse, remarques, courrier… mais elles ne peuvent être portées que par deux entités distinctes ; soit elles sont déposées par le Gouvernement à l’issue du conseil des ministres et l’on parle alors de « projets de lois » (PL, en jargon technique), soit elles sont le fait d’un ou de plusieurs parlementaires et on les qualifie ainsi de « propositions de lois » (PPL, en jargon technique). Le texte ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe est d’initiative gouvernementale, c’est pourquoi on l’évoque comme un projet de loi.
Quelle qu’en soit l’origine, les projets et propositions de loi doivent ensuite être examinés par les deux chambres du Parlement. Le dépôt d’un projet de loi peut s’effectuer indifféremment, sauf dans certains cas, au Bureau de l’Assemblée nationale ou du Sénat. En revanche, une proposition de loi doit être déposée obligatoirement sur le Bureau de l’assemblée du parlementaire auteur de la proposition. Toujours pour faire le parallèle avec notre texte, c’est l’Assemblée nationale qui a été la première à s’exprimer sur ce projet de loi.
Plus précisément, le texte a d’abord été examiné en commission. De nombreuses auditions ont été organisées dans le cadre de ce travail préparatoire essentiel. Aussi, les députés ont pu écouter les avis, opinions, remarques nécessaires à l’expression démocratique et à l’amélioration de la justesse et de la pertinence du texte. Ces auditions ont été extrêmement nombreuses s’agissant du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de mêmes sexes : des associations cultuelles aux enfants de couples homoparentaux, en passant par divers syndicats, associations, médecins…
Chaque texte est rattaché et examiné par une commission principale, qui désigne un rapporteur. Mais une ou plusieurs autres commissions peuvent également être saisies « pour avis » si le texte touche aussi une partie du champ de compétence de cette ou ces commissions. C’est ce qui s’est produit pour le projet de loi ouvrant le mariage présenté par Christiane Taubira : la commission des lois a été saisie et a désigné Erwann Binet comme rapporteur, la commission des affaires sociales a, quant à elle, été saisie pour avis et c’est Marie-Françoise Clergeau qui a été rapporteure pour avis (fonction que j’ai exercée pour le projet de loi sur le harcèlement sexuel en juillet 2012).
Limiter le cumul des mandats fait respirer la démocratie - Ma tribune dans Le Monde
23/01/13
Élue députée en juin 2012, j’ai démissionné de mon mandat de conseillère générale du Doubs, conformément à l’engagement que j’avais pris durant la campagne.
En présentant ses vœux aux parlementaires, François Hollande a réaffirmé sa détermination pour que la réforme limitant le cumul des mandats voie le jour durant le quinquennat. Je salue cette confirmation et milite pour qu’elle soit mise en oeuvre. Au-delà des principes fondamentaux qui justifient une telle réforme, je souhaite souligner ici les avantages concrets qui découlent de cette décision.
D’abord, je peux être davantage sur le terrain. Si j’étais restée conseillère générale, je serais tenue d’être présente en session plénière un lundi toutes les cinq semaines. La semaine précédant cette session, je participerais à la commission des solidarités. Encore en amont, je passerais une dizaine d’heures à étudier les différents dossiers sur lesquels nous avons à nous prononcer. Si j’estime que la plénière dure environ six heures, la commission deux heures trente et la préparation dix heures, cela représente dix-huit heures trente au minimum.
Sachant que je consacre en moyenne trente minutes par rendez-vous à ma permanence parlementaire, une heure trente par visite d’entreprise, d’association ou d’exploitation agricole, en supprimant cette seule journée de session obligatoire au conseil général et le travail afférent, qui revient toutes les cinq semaines, je gagne l’équivalent de trente-sept rendez-vous avec des concitoyens ou de douze visites.
Ainsi, exercer exclusivement mon mandat de députée me permet d’être plus longtemps au contact de la population, de la réalité du territoire et de ses acteurs.
Ensuite, en étant exclusivement parlementaire, je gagne du temps pour travailler les textes. Si j’avais gardé mon mandat au conseil général, j’aurais dû consacrer du temps aux inaugurations, aux réunions, aux dossiers du département. Si j’étais restée conseillère générale en devenant députée, mon travail d’élue locale s’en serait également ressenti : j’aurais été absente de mon canton au moins trois jours par semaine pour siéger à l’Assemblée nationale.
Le travail peut bien sûr être délégué, soit à d’autres élus - mais alors autant leur laisser la place -, soit aux fonctionnaires des collectivités. L’administration ne fait là que combler un vide laissé par l’élu qui n’a pas suffisamment de temps. Il ne s’agit pas d’un problème de compétences puisque les services, dont c’est la formation et le métier, connaissent mieux les dossiers, d’un point de vue technique, que les élus. Il s’agit d’un réel problème politique et démocratique parce que les citoyens votent pour que leurs élus décident et tranchent en fonction de la vision qu’ils portent. C’est bien cela, notre rôle d’élus. Sinon, autant remplacer les élections par un concours de la fonction publique afin d’avoir les meilleurs techniciens.
Renouvellement politique
Enfin, ma démission de l’assemblée départementale a permis que le conseil général du Doubs s’enrichisse d’un nouvel élu. En soi, c’est intéressant que quelqu’un qui n’avait jamais détenu de mandat électif y accède. Un nouvel élu, c’est un regard neuf sur l’action menée, utile pour renouveler sa vision et discuter des politiques conduites. La limitation du cumul est une condition nécessaire, sinon suffisante, au renouvellement du personnel politique ; elle ouvre la voie aux plus jeunes, aux femmes, aux ouvriers, aux Français issus de l’immigration.
Barbara Romagnan
Députée (PS) du Doubs
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