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Programme de stabilité et pacte de responsabilité : pourquoi je me suis abstenue

L'Assemblée nationaleMardi 29 avril, avec 40 députés socialistes, je me suis abstenue sur le vote relatif au programme de stabilité 2014-2017 et au pacte de responsabilité. Mes réserves ne portent pas sur l’objectif de réduction du déficit et la nécessaire maîtrise des dépenses publiques. Je partage cette exigence avec mes collègues. Il est d’ailleurs paradoxal d’affirmer vouloir réduire le déficit tout en prévoyant 41 milliards d’euros d’allègements de cotisations pour les entreprises. Mais c’est la trajectoire proposée par le Gouvernement me semble erronée et dangereuse, sur les plans social, économique et politique.

Le pacte proposé est largement déséquilibré. Il est injuste sur le plan social car la baisse massive des impôts auxquels sont soumises les entreprises est financée par un gel massif des prestations sociales. Ce sont donc les catégories populaires et moyennes qui paient pour les allègements de cotisations de toutes les entreprises, et ce, de façon indifférenciée, sans tenir compte de la taille, des filières, de l’exposition à la concurrence. Ces orientations risquent également d’être inefficaces sur le plan économique et de l’emploi. Les baisses de cotisations patronales, pratiquées depuis longtemps, n’ont jamais réellement montré leur impact massif sur le chômage. L’effet récessif à court terme de cette politique, souligné par le Haut conseil aux finances publiques, est un vrai risque. On peut par ailleurs s’interroger sur la rentabilité économique de ce dispositif : l’OFCE évalue à 130 000 euros, l’emploi créé dans le cadre du CICE (20 milliards d’euros de crédit d’impôt créeraient 150 000 postes).

Cette politique me paraît enfin dangereuse sur le plan politique. En entretenant l’idée qu’il n’existe qu’un seul diagnostic et qu’une seule politique efficace en matière économique, on prend le risque de détourner encore plus les citoyens des urnes ou de laisser aux démagogues et aux populistes le monopole de l’alternative. Or d’autres politiques associant justice sociale et efficacité économique sont possibles. On peut, comme nous nous y sommes engagés lors des campagnes de 2012, lutter contre la fraude fiscale, réduire les niches, engager enfin la grande réforme fiscale, investir dans la transition écologique. Avec de nombreux parlementaires, nous avons fait des propositions pragmatiques et, je crois, utiles au pays. En tant que députés, nous avons été élus dans la dynamique de l’élection présidentielle, soutenus et encouragés par de nombreux citoyens sur la base des engagements que nous avons pris devant eux.  Le vote des municipales nous a rappelé douloureusement que nous nous en étions trop éloignés. Nous devons reconquérir la confiance de nos concitoyens et faire ce pour quoi nous avons été élus il y a moins de deux ans : réduire les inégalités sociales qui minent notre pacte républicain, nous engager vraiment dans la transition écologique, partager et réduire le travail pour chacun puisse travailler. Il nous faut préparer la France de demain et cela ne peut se faire sans investissements. Nous nous réjouissons, dans ce sens, d’avoir pu, par notre démarche, apporter quelques améliorations pour les minimas sociaux.

Nous voulons un redressement juste, par un équilibre entre la réduction des déficits et les investissements. Ce pacte n’est pas équilibré. Nous avons été constructifs en faisant des propositions. Nous continuerons à chaque étape à nourrir ce dialogue avec le Gouvernement. Notre volonté est d’être des acteurs de la réussite de la gauche au pouvoir.