Économie

Taux d’imposition à 75 % des très hauts revenus : « Un besoin de décence partagée »

La proposition de créer un taux d’imposition à 75 %, annoncée par François Hollande pour les très hauts revenus, a provoqué l’ironie et les sarcasmes de la droite.

François Baroin, ministre de l’Économie et des Finances, raille cette proposition en trouvant « qu’elle n’a pas beaucoup de sens, qu’elle représente quelque chose de marginal symbolique et qu’elle est économiquement inefficace en terme de recettes pour le trésor public ».

Justement, je pense qu‘au-delà de sa valeur redistributive, même limitée, c’est la valeur symbolique et politique de cette mesure qui est importante et qui concerne tout le monde. Elle exprime un besoin de décence partagée, le sentiment d’appartenir à un monde commun, sans lesquels il ne peut y avoir de société.

N’est-ce pas ce lien social, le sentiment de faire société, qui est en crise et qu’il faut reconstruire aujourd’hui ?

Cette proposition est aussi un geste politique simple et fort. Il marque la nécessité de mettre un frein à l’idéologie de la démesure, du “toujours plus” et de l’argent comme valeur absolue. Ne peut-on pas être un chef d’entreprise compétent, un artiste ou un sportif brillant en gagnant moins d’un million d’euros par an ?

Par cette proposition, François Hollande illustre ce qui distingue sur le terrain des valeurs, la gauche de la droite actuelle.

Barbara Romagnan
Conseillère générale du Doubs
Candidate PS aux élections législatives
1ère circonscription du Doubs

« Délocaliser n’est pas une fatalité », par Marie Coris (Le Monde)

Je vous propose la lecture de ce « Point de vue » de Marie Coris, chercheuse sur les délocalisations, publié sur Le Monde.fr le 27 février.

Après la « prime à la relocalisation », en 2009, une nouvelle mesure a été annoncée, dimanche 29 janvier, par le chef de l’Etat pour lutter contre les délocalisations : baisser le coût du travail. L’idée est simple : diminution des charges sociales patronales et compensation par une hausse de la TVA (baisse des recettes oblige). Face à l’inefficacité de la mesure prise en 2009 (voir le point de vue d’El Mouhoub Mouhoud, Le Monde du 9 mars 2010), que peut-on attendre de cette proposition ? Au regard des connaissances disponibles sur la question, rien. Et ce d’autant plus que la mesure se fonde sur une idée reçue, celle de la responsabilité seule du coût du travail.

Acceptons temporairement l’hypothèse selon laquelle le coût du travail serait bien responsable des délocalisations et de la désindustrialisation. Dans ce cas, ce n’est certainement pas la mesure annoncée qui modifiera la tendance. La baisse supposée du coût de production en France (induite par la baisse du coût du travail) ne peut absolument pas être suffisante pour compenser les différentiels de coûts du travail, y compris si elle est accompagnée d’une hausse de la TVA sur les produits importés. A moins d’un très sérieux alignement par le bas, d’une précarisation de l’emploi poussée à l’extrême, voire d’un recours aux formes illégales du travail, il n’y a aucun moyen de lutter contre les délocalisations motivées par les différentiels de coût du travail. Ceux-ci sont beaucoup trop importants. La tendance naturelle, c’est l’alignement vers le haut. Progrès social oblige, les salaires augmentent dans les pays dits « low cost », comme en Chine où on a assisté à un triplement du salaire moyen entre 1990 et 2005, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

La mesure ne peut qu’être inefficace, mais là n’est pas la question. Inéluctables, les délocalisations ? Pas toujours, car la relation entre désindustrialisation, délocalisation et coût du travail est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît.

Désindustrialisation et délocalisation ne sont pas synonymes

Les termes de désindustrialisation et de délocalisation ne vont pas de pair. Aucune relation causale n’est clairement établie entre ces deux réalités. Sacrifions au rite actuel pour s’en convaincre : la comparaison avec l’Allemagne. Les délocalisations vers les pays de l’Est sont une donnée structurelle de l’économie allemande. L’Allemagne est l’un des pays qui délocalise le plus, sans pour autant être victime de désindustrialisation. Tout ici est question de politique et de spécialisations industrielles. La faute n’incombe pas aux délocalisations. Allons encore plus loin.

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9 mai : Fête de l’Europe ? En tout cas pas celle des Grecs !

Je dois avouer que je suis un peu perplexe sur le vote positif du groupe socialiste, vert et républicain en faveur de ce que l’on appelle le "plan de sauvetage de la Grèce".

Que se passe-t-il ? Le 19 mai, la Grèce sera au pied du mur. Il lui faudra rembourser 9 milliards d’euros, faute de quoi, elle sera déclarée en faillite. Il lui faut donc emprunter, mais à qui, comment et à quel taux ?

 La question est qui doit payer la note ? On a prêté aux banques en creusant les déficits publics, après on demande aux salariés de rembourser le déficit de l’Etat, le tout sous la pression des agences de notation qui menacent de retirer aux pays leur A+ s’il n’y a pas de politique d’austérité.

On impose à la Grèce d’emprunter aux banques à 8 % alors que ces mêmes banques empruntent à la BCE à 1 %. La France emprunte à 3 % et prête à la Grèce à 5 %.

Ainsi, les banques, les Etats vont faire du bénéfice, sur le dos de la Grèce, en l’occurrence, du peuple grec.

Cette politique d’austérité est injuste car elle signifie qu’on fait payer les salariés (austérité salariale), les citoyens grecs bénéficiaires des services publics (limitation des dépenses publiques) qui, rappelons le, ne sont pas les responsables de cette crise.

Cette politique d’austérité n’est pas forcément pertinente économiquement. En effet, si le plan d’austérité conduit à casser la croissance, ce qui est probable, le Grèce aura encore plus de difficultés à rétablir ses comptes publics. Et il y a un fossé considérable entre les contraintes fixées au peuple grec et l’absence de contrôle et de sanctions à l’égard de ceux qui auraient spéculé contre le pays.

Le 9 mai est le jour de la Fête de l’Europe. Pourtant, on a du mal à s’en rendre compte. Ceux qui se présentent comme solidaires donnent plus l’impression de faire des affaires sur le dos des Grecs.

Cette banque qu’on appelle Banque Centrale Européenne ne peut pas prêter l’argent nécessaire à un pays membre. Il ne faut pas s’étonner du désamour des citoyens pour cette si belle idée et il est plus que temps de lui donner les moyens d'être au service des peuples et non pas prioritairement des banques et des marchés.

Du bon usage de l’argent public…

Selon une étude du Ministère de l’économie et des finances réalisée à la demande de la commission des finances de l’Assemblée nationale : en 2007, 615 contribuables ayant un patrimoine de plus de 15,5 millions d’euros et des revenus annuels supérieurs à 42 000 euros, ont capté 63 % du coût total du bouclier fiscal. L’Etat leur a versé 144 millions d’euros. Chaque contribuable concerné a reçu un chèque de 233 000 euros en moyenne.

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Chômage et heures sup’

Je vous conseille vivement la lecture de cet article de Guillaume Duval, rédacteur en chef d’Alternatives économiques. Cet article est tiré de son ouvrage Sommes-nous des paresseux ? Et trente autres questions sur la France et les Français » aux éditions du Seuil,

Le 21 août dernier, Christine Lagarde, Ministre de l’Economie, se félicitait du succès de la loi TEPA (Travail, emploi, pouvoir d’achat), et tout particulièrement de son volet « heures supplémentaires ». Une semaine plus tard, l’ANPE confirmait la remontée du chômage au mois de juillet. Quantitativement le succès des heures supplémentaires détaxées est indéniable mais, dans le contexte économique actuel, il traduit une politique digne des Shadoks ou du père Ubu. Face au risque de récession, le Gouvernement devrait au contraire revenir d’urgence sur une mesure qui aggrave la situation de l’emploi.

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