LES NOUVEAUX VISAGES DE L’ASSEMBLÉE

Toutes les semaines, Libération.fr dresse le portrait d’un des 217 primodéputés. Aujourd’hui, l’élue du Doubs chantre de la transparence et du non-cumul.

Par CHARLOTTE ROTMAN

Barbara Romagnan, à l'université d'été du PS, le 25 août 2012, à La Rochelle. (Photos Jean-Pierre Muller. AFP et Charles Platiau. Reuters)

Barbara Romagnan, à l'université d'été du PS, le 25 août 2012, à La Rochelle. (Photos Jean-Pierre Muller. AFP et Charles Platiau. Reuters)

Elle n’a vraiment pas l’impression de faire un truc extraordinaire. Plutôt, « le minimum démocratique vital ». Est-ce pour cela qu’elle ne se départit pas d’un sourire amusé ? Barbara Romagnan a rendu publique l’utilisation de sa réserve parlementaire. Cette enveloppe de subventions votée dans la loi de finances permet aux députés et sénateurs de financer des opérations d’intérêt local, associations ou projets. Sauf que sa répartition et son utilisation restent opaques. Son existence même est contestée.

« Dans une mairie, un euro qui rentre, un euro ou qui sort, tout doit être justifié. Là, c’est pareil : ce n’est pas notre argent… », argumente la députée du Doubs. Elle a choisi d’aider des projets qui correspondent aux priorités qu’elle a affichées lors de sa campagne électorale, notamment la petite enfance, l’éducation, la santé, et a tout publié sur son site. Elle n’est pas la seule, et d’autres députés lui ont emboîté le pas. Mais cet effort de transparence demeure rare. Pourtant, « ces signes, simples et qui ne coûtent rien, sont de nature à redonner un peu confiance en la politique .»

Engagée pour la « moralisation de la vie politique », Barbara Romagnan, 39 ans, se bat également pour la fin du cumul des mandats. Une fois élue députée, elle-même a démissionné de son mandat de conseillère générale. « Mon canton a toujours été très à gauche, alors que ma circonscription, ce n’est pas sûr que je la récupère. Mais c’est comme ça que les gens peuvent avoir confiance. J’applique ce que je raconte. »

Cela ne passe pas toujours. « Sur le cumul, on me l’a beaucoup renvoyé, c’est souvent interprété comme si je faisais la morale à tout le monde. » Comme si, en assumant de « rendre des comptes », elle désignait les réfractaires, les traîne-savates. Pourtant, jure-t-elle, ces « enjeux démocratiques » sont faciles à traduire dans un texte de loi et dans les pratiques, sans ouvrir pour autant « une chasse aux sorcières ».

Et puis, elle ne se présente pas en valeureuse et pure chevalière. « Quand je fais une intervention, je dis d’où je parle. Comme il y a quelques jours, à Lons-le-Saunier, devant des jeunes élus, sur la moralisation de la vie politique et le cumul des mandats, j’ai pris soin de me présenter : quand on est une femme, jeune, on a aussi intérêt à ce que les postes se libèrent. »

Libération« Libé » avait suivi ses premiers pas à l’Assemblée. Huit mois après, cette docteure en sciences politiques et enseignante revendique encore un droit à la transition. « Il y a des choses que je ne gère toujours pas très bien. Et encore, je ne fais rien d’autre que députée. » Elle n’a pas voulu d’un siège au bureau national du PS, mais elle est membre de la commission des affaires sociales et de la délégation droits des femmes. Elle veut, aussi, faire vivre l’aile gauche dont elle est l’une des têtes d’affiche ou porter le credo écolo de la gauche durable. Souvent, il lui faut choisir entre des réunions concomitantes. « Il faut que je me limite davantage » avoue-t-elle. Sans compter sa vie personnelle qu’elle essaye de préserver. « Je ne cumule pas mais je tiens à aller chercher ma fille à l’école quand je peux, par exemple le jeudi quand je reviens à Besançon. On a besoin de temps pour soi et de compenser avec sa famille une forme de distance nouvelle ».

Les députés assidus s’avalent réunions, textes, séances, elle confesse aussi avoir « besoin de souffler, de lire plus ou d’aller boire un verre. » Elle ne s’en cache pas: c’est bien si « la vie qu’on mène se rapproche de celles des électeurs » qui « comprennent mais attendent aussi de nous qu’on soit présents ».

A l’Assemblée où elle s’est prononcée contre le traité, mais pour la procréation médicalement assistée, Barbara Romagnan essaye de vivre le moins mal possible le « décalage » qui peut parfois exister entre les engagements de François Hollande, les siens, et la solidarité de groupe qu’elle juge «essentielle». Elle a mal au cœur quand elle abandonne un amendement dans le texte sur le délit de solidarité auquel elle croyait mais se ressource en écoutant Taubira sur le mariage pour tous. Elle a aussi voté la réforme du mode de scrutin aux élections locales, adoptée ce mardi, et qui permettra d’assurer une représentation paritaire dans les conseils départementaux.