Article Politis : « Vote de confiance, pourquoi nous nous abstiendrons »
La semaine dernière est paru dans la revue Politis un article dans lequel j’expliquais les raisons de notre abstention lors du vote de confiance à venir. Je vous propose de le lire ci-dessous :
Mardi 16 septembre nous devrons dire si nous accordons notre confiance au deuxième gouvernement formé par Manuel Valls. Le 8 avril, nous avions été 11 députés socialistes à refuser cette confiance – fait inédit dans la Vème république –, le 29 avril nous avons été 41 à rejeter le pacte de responsabilité, le 8 juillet nous avons été 35 à adopter la même attitude sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, rectificatif. Après discussion, nous nous orientons vers une abstention collective que nous espérons la plus importante possible.
A de nombreuses reprises nous avons eu l’occasion de dire non à cette politique, que nous jugeons injuste socialement, inefficace économiquement et dangereuse politiquement. En effet, la baisse massive des contributions auxquelles sont soumises les entreprises est financée par un gel massif des prestations sociales. Ce sont donc les catégories populaires et moyennes qui paient pour les allègements de cotisations de toutes les entreprises, et ce, de façon indifférenciée, sans tenir compte de la taille, des filières, de l’exposition à la concurrence. Ces orientations semblent faire la preuve de leur inefficacité sur le plan économique et de l’emploi. Les baisses de cotisations patronales, pratiquées depuis longtemps n’ont jamais montré un impact massif sur le chômage, comme l’a d’ailleurs récemment reconnu le ministre de l’économie et des finances Michel Sapin à propos du CICE. Enfin, cette politique nous semble politiquement dangereuse. En entretenant l’idée qu’il n’existe qu’une seule politique économique possible, on prend le risque de détourner encore plus les citoyens des urnes ou de laisser aux démagogues et aux populistes le monopole de l’alternative. D’autant plus que ce n’est pas la politique pour laquelle nous avons été élus. C’est une question très sérieuse, car si les propositions de campagne n’engagent pas ceux qui les font, alors le vote n’a plus de sens, il ne sert à rien de voter, la démocratie est discréditée.
Mais alors pourquoi ne pas voter contre et « seulement » s’abstenir ?
Comme socialistes et démocrates, notre objectif est de faire triompher les orientations que les socialistes partageaient juste avant l’élection, celle qui a porté François Hollande au pouvoir. Notre objectif n’est pas la rupture avec un parti qui, même s’il a parfois déçu, a porté les plus grandes conquêtes sociales de notre pays quand il était fidèle à ses valeurs, ses soutiens.
Alors que la confiance entre les citoyens et le pouvoir est rompue, nous essayons de tenir une position qui permette l’union la plus large possible des socialistes, de la gauche, des citoyens. Cette union est indispensable à une réorientation de la politique et à notre vivre ensemble. Par notre abstention nous voulons dire à la fois notre rejet de cette politique qui a renoncée et aussi notre ouverture et notre volonté de négocier pour avancer collectivement et faire cesser cette politique. Nous nous sommes présentés pour améliorer le pouvoir d’achat, faire reculer le chômage, réduire les inégalités et relancer l’investissement. Or, depuis deux ans le chômage n’a cessé d’augmenter, les inégalités de se creuser et, c’est un comble, nous sommes le pays champion du monde de l’augmentation des dividendes.
Ce qui nous a guidés, c’est de parvenir à construire la position la plus partagée pour faire passer notre message de réorientation politique. Nous voulons être les plus nombreux possible à dire que cette orientation ne recueille pas la confiance. C’est la position d’abstention qui nous apparaît comme la plus à même de le faire. Pour autant nous assumons qu’il faut un nouveau gouvernement pour mener une autre politique et que cette nouvelle majorité existe sur les bancs de la gauche. Si nous sommes nombreux à ne pas voter la confiance, le président de la République devra en tenir compte. Il reste deux ans et demi à la gauche pour respecter ses engagements et ceux et celles qui l’ont élue. C’est le pacte que nous proposons à François Hollande.