Tribune / Egalité salariale : enfin des sanctions
« A ce jour, aucune sanction n’a été prononcée à l’encontre d’une entreprise n’ayant pas conclu d’accord ou réalisé de plan d’action » en faveur de l’égalité salariale entre hommes et femmes. Publié le 19 décembre, un nouveau décret précise les obligations des entreprises. Il faut encore en assurer une réelle mise en œuvre, estiment Catherine Coutelle, députée de la Vienne et présidente de la délégation aux Droits des femmes de l’Assemblée nationale, et onze député(e)s dans une tribune publiée sur Mediapart. Très mobilisée depuis toujours sur ces questions d’égalité femmes-hommes, je me suis naturellement associé à cette tribune que je vous propose de lire.
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Les salaires des femmes demeurent aujourd’hui inférieurs de 27 % à ceux des hommes : ce seul chiffre vaut constat d’une inégalité salariale qui perdure. Le « plafond de verre » reste lui aussi d’actualité : les femmes occupent moins d’un tiers des postes d’encadrement dans les entreprises et elles ne représentent que 17% des dirigeants salariés d’entreprise.
Pourtant, la législation en faveur de l’égalité professionnelle compte déjà presque un demi-siècle d’histoire. Rappelons seulement trois dates clés : en 1972, le principe de l’égalité salariale est inscrit dans le code du travail, assurant la transcription juridique de la revendication « à travail égal, salaire égal ». En 1983, la loi Roudy institue l’obligation du rapport de situation comparée (RSC), outil de diagnostic des inégalités professionnelles et salariales entre les femmes et les hommes dans l’entreprise. En 2011, dans un rapport d’information consacré à l’application des lois sur l’égalité professionnelle au sein des entreprises, la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale dresse un constat éloquent : moins de la moitié des entreprises réalise un RSC et quasiment jamais ce rapport n’est utilisé pour réaliser un plan d’action pour l’égalité salariale.
Le constat est sans appel : l’incitation seule ne suffit pas. Il ne reste donc qu’une solution face à l’inertie : sanctionner. C’est pourquoi, après des mois de discussion, l’article 99 de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites a institué pour la première fois une sanction financière équivalant à 1 % des rémunérations et des gains à l’encontre des entreprises d’au moins 50 salariés qui n’auraient pas conclu d’accord d’égalité professionnelle. Cette sanction avait fait naître un réel espoir. Hélas, le décret d’application paru le 7 juillet 2011 y a mis fin. Il avait d’ailleurs été unanimement rejeté par le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle. Nous avions malheureusement raison: à ce jour, aucune sanction n’a été prononcée à l’encontre d’une entreprise n’ayant pas conclu d’accord ou réalisé de plan d’action. Lors de l’examen du projet de loi sur la création des emplois d’avenir par l’Assemblée nationale, en septembre dernier, nous avons toutefois pu remédier à certaines lacunes du droit. Un amendement adopté par l’Assemblée prévoit que dans les entreprises d’au moins 300 salariés, le défaut d’accord est attesté par un procès-verbal de désaccord, redonnant ainsi la priorité à la négociation sur le plan unilatéral. Mais il fallait aller plus loin.